Où sont passé les entreprises qui étaient jadis sur le canal Lachine et
dans le Vieux-Montréal ? Pourquoi sont-elles parties ne laissant
derrières elles que des terrains contaminés, terreau des futurs projets de
condos ?
« L'industrie québécoise vit, pendant ces deux décennies [1960-1970] un
processus accéléré de modernisation qui, déjà amorcé dans les années 1950,
prend une ampleur nouvelle après 1960. Cette modernisation se manifeste
de plusieurs façons: des machines de plus en plus sophistiquées et
automatisées, une gestion informatisée et même une architecture
industrielle radicalement transformée.
[...]
La modernisation s'accompagne d'une relocalisation des
installations. La vieille usine, située dans un quartier industriel
ancien, ne convient plus. Le chemin de fer ou la voie d'eau, autrefois des
facteurs importants de localisation, sont de plus en plus remplacés, à ce
titre, par les grandes autoroutes. Dans certains cas, les usines
existantes peuvent accueillir une nouvelle machinerie mais, très souvent,
les entreprises préfèrent s'installer à neuf. Il y a donc un véritable
redéploiement spatial de l'industrie manufacturière. Ce phénomène est
particulièrement visible dans la région de Montréal, où les vieilles zones
industrielles situées le long du canal Lachine ou en bordure du fleuve, du
côté d'Hochelaga et de Maisonneuve, sont peu à peu abandonnées au profit
de nouveaux emplacements en banlieue. Situées à proximité des grans axes
routiers, les villes de Dorval, Saint-Laurent, Anjou, Montréal-Nord
accueillent dans leurs parcs industriels les nouvelles usines. Même la
vieille industrie du vêtement, entassée depuis longtemps au centre-ville,
migre vers de nouveaux secteurs, dans des édifices modernes. [...]
La modernisation de la production industrielle a parfois des
conséquences négatives. Placés devant la nécessité de relocaliser leurs
installations, de nombreux administrateurs s'interrogent sur la
pertinence de rester au Québec. Le déplacement vers l'ouest de l'activité
économique et la forte croissance de l'Ontario et des provinces de l'Ouest
en incitent plusieurs à se rapprocher de leur marché principal en fermant
leurs usines du Québec, devenues désuètes, et en les remplaçant par de
nouvelles, situées en Ontario.
» Histoire du Québec contemporain, tome II
Le Québec depuis 1930
pages 479-480
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Deux remarques:
1- Ça explique pourquoi je vous écris en direct de Dollard-des-Ormeaux,
pourquoi Nortel et autres grands immeubles se situent maintenant à ville
St-Laurent. Je qualifierais le présent emplacement d'Ubisoft de «2e
migration», puisqu'ils occupent des locaux (boulevard St-Laurent coin
St-Viateur) qui étaient auparavant une manufacture, manufacture qui
n'était pas au centre-ville.
2- La migration des entreprises vers l'Ontario a aussi une cause
conjucturelle, ce n'est pas seulement due à la peur de la montée du
mouvement indépendantiste du Québec.
Miguel