Déterminisme: de Laplace à Power Corporation
Billet originalement publié sur le Huffington Post.
Les scientifiques du 19e siècle ont particulièrement été marqués par la théorie du « déterminisme classique ». Dans sa forme la plus pure, énoncée par le physicien et mathématicien Pierre-Simon de Laplace, cette théorie veut que l'état d'un système à un instant donné dépende de ses états précédents. Ou dit autrement, l'avenir comme le passé sont prévisibles si l'on connaît le moment présent.
Bien que populaire pendant près d'un siècle, cette théorie s'est vue contredite au 20e siècle par deux découvertes. D'abord par l'effet papillon, qui démontre qu'une perturbation infime des conditions initiales peut avoir des conséquences imprévisibles à long terme. Puis par la mécanique quantique, qui implique que le hasard, ou l'inconnu, fait partie intégrante de la nature. On ne peut donc parfaitement prédire l'avenir, peu importe la connaissance que nous avons sur le moment présent. C'est d'ailleurs pour cela qu'il sera toujours impossible d'avoir une prévision météo parfaite!
Le déterminisme est toujours populaire au 21e siècle. Il a quitté le milieu de la physique pour le domaine de la politique. Beaucoup de gens œuvrant dans ce milieu prennent en effet pour acquis que si on connaît avec assez de précision une population, essentiellement grâce aux résultats d'élections, aux sondages et à la démographie, il est possible de prévoir son comportement politique, ou encore mieux, de l'influencer à partir de cette information.
Lorsque Power Corporation utilise sa branche médiatique en qualifiant abusivement de « grand sondage » un sondage non scientifique indiquant que les jeunes ne sont plus indépendantistes, ce n'est pas une mesure de la population. C'est une tentative pour que les déterministes politiques de tout acabit concluent que l'avenir du Québec est joué, qu'il se déroulera dans le cadre fédéral canadien. C'est cette vision de l'avenir que promeut Power Corporation et la publication de ce sondage ne fait que renforcer sa ligne éditoriale.
Or, bien que le contexte présent puisse expliquer une partie de l'avenir d'un peuple, il ne le détermine pas. Les changements dans une société peuvent survenir de façon imprévisible, comme le printemps érable, et être au départ invisible pour la société, invisible pour les sondages, invisibles pour les analystes et autres mesureurs de population.
Il faut briser cette habitude d'analyser les chiffres comme s'ils déterminaient l'avenir du peuple québécois. Nous retirons ainsi un pouvoir des mains de toutes les Power Corporation de ce monde qui désirent maintenir le statu quo. Un peuple conscient de son potentiel est un peuple qui réclame sa liberté. Or, c'est en bridant l'éveil de nos capacités que nous demeurons un peuple conquis et satisfait. Ceux qui traitent les Québécois de faibles, de BS, de quêteux sont dans leur majorité des défenseurs de l'ordre établi, du fédéralisme. Écoutons plutôt ceux qui nous disent grands, ceux qui nous disent forts. Le jour où nous aurons réalisé notre propre valeur, celle de notre grandeur en tant que peuple, ce jour-là nous serons libres. Et dès le lendemain nous le ferons, ce pays qui n'attend que nous.
Les grands pays qui sont devenus indépendants le sont devenus par le peuple. Le mouvement doit venir du peuple vers le politique, pas le contraire. Je pense que le nombre de personnes qui sont inconfortables dans le système actuel n'est pas assez important pour que la vague se crée et mène à l'indépendance. J'aimerais bien que la chose soit possible, mais les probabilités sont minimes pour les prochaines années.
Désolé!