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Des Forces armées canadiennes à l'armée du Québec

Billet originalement publié sur le Huffington Post.

L'accession d'un État à l'indépendance pose plusieurs questions capitales, notamment celle portant sur l'armée du pays qui serait créé. Tout projet sérieux d'accession du Québec à l'indépendance doit donc aborder cette question et fournir des réponses étoffées au peuple québécois. Afin d'inviter les Québécois à débattre de cet important sujet, j'ai esquissé sous forme de questions-réponses un portrait d'une armée possible pour le Québec.

Divisé en trois parties, les réponses aux questions donnent un point de départ pour permettre les discussions sur cet important sujet. La première partie exposait la mission et les alliances de l'armée du Québec et la deuxième partie la composition de l'armée du Québec. Voici la troisième partie où j'expose ce que serait la transition des Forces armées du Canada à l'armée du Québec.

Combien coûterait l'armée du Québec?

Le coût d'une armée du Québec serait étroitement relié aux missions qu'elle aurait à remplir. Il est possible de faire une estimation en comparant le budget des armées ayant des missions et des troupes semblables à celles indiquées dans la deuxième partie des questions-réponses.

En se basant sur l'armée néo-zélandaise, les Royal Marines ou la Légion étrangère, on peut estimer le coût annuel entre 2 et 3 milliards de dollars canadiens. Cette somme est inférieure à la proportion du budget militaire canadien correspondant au poids démographique du Québec (4,3 milliards selon le budget 2014-2015). Une armée du Québec représenterait donc une économie par rapport à ce que paient les contribuables québécois pour les Forces armées du Canada.

Cependant, il faut souligner que la création d'un ministère de la Défense serait coûteux. Cela permettrait par contre de créer des structures légères départies du poids administratif que le Canada traîne depuis la fin de la guerre froide.

Les Québécois économiseraient en n'investissant pas dans les domaines suivants:

Quel matériel pourrait-on récupérer des Forces canadiennes?

Il serait fort probablement possible de récupérer tout le matériel des unités de l'armée de terre sur le territoire québécois, incluant tout ce qui est à Valcartier (chars, artillerie, véhicules, etc.).

La négociation portant sur les avions CF-18 pourrait se faire à l'avantage du Québec, compte tenu qu'il possède la moitié de la flotte et que celle-ci pourrait avoir une grande valeur monétaire. Cependant, puisque les CF-18 ne seraient pas essentiels pour accomplir les missions de l'armée du Québec, il serait possible de les échanger contre d'autre matériel, comme par exemple celui du 25e Dépôt d'approvisionnement situé à Longue-Pointe. Il serait par la suite possible de faire l'acquisition d'avions de transport, d'attaque au sol et de surveillance du territoire.

Le Québec n'aurait aucun matériel provenant de la Marine royale canadienne.

Le Québec n'a aucune ressources en renseignement ou en espionnage électronique. Ce domaine devrait donc être développé entièrement, ce qui pourrait s'avérer coûteux.

Le Centre de recherche scientifique militaire serait situé à Valcartier, puisque les infrastructures et les équipements de recherche de l'armée canadienne sont déjà à cet endroit. Ce centre pourrait devenir un centre de recherche gouvernemental qui pourrait être utile aux autres ministères du Québec, en plus de la Défense.

Que proposer aux soldats québécois dans les Forces canadiennes?

Il y a fort à parier que, pour des raisons de langue et de culture, un grand nombre de Québécois présents dans les Forces armées du Canada voudrait rejoindre l'armée du Québec lors de la création du pays.

Il faudrait que le transfert des soldats d'une armée à l'autre se fasse sans difficulté. Pour se faire, il faudrait au minimum offrir aux soldats québécois présents dans l'armée canadienne:

  • La reconnaissance de leur rang;
  • La reconnaissance des années de services au Canada;
  • Un salaire et des avantages sociaux similaires.

Comment reconnaître les décorations et les grades militaires acquis dans les Forces canadiennes?

Une loi devrait être votée pour reconnaître les décorations et les grades militaires acquis dans les Forces canadiennes.

Actuellement, les militaires canadiens peuvent d'ailleurs porter certaines décorations étrangères (gagnées avec les Américains par exemple). C'est chose commune entre les armées.

Où seraient situées les bases militaires?

Les bases militaires de l'armée canadienne déjà présentes sur le territoire québécois seraient transformées en bases de l'armée du Québec. Il s'agirait de:

  • Saint-Jean-sur-Richelieu: formation
  • Valcartier: brigade d'élite
  • Longue-Pointe: quartier général national et centre logistique
  • Bagotville: composante aérienne

Les ports pour la garde côtière légèrement armée seraient situés à Québec pour la surveillance du fleuve Saint-Laurent, et à Sept-Îles pour la surveillance du golfe.

Où se trouverait l'école militaire?

Puisque Saint-Jean-sur-Richelieu possède déjà les infrastructures d'entraînement, cette ville deviendrait le centre nerveux de la formation militaire, tant pour les cours de base que pour les cours spécialisés.

Les professeurs sont d'ailleurs déjà sur place pour l'école des officiers de l'armée canadienne. L'école des recrues des Forces canadiennes se trouve elle aussi à Saint-Jean-sur-Richelieu et pourrait être convertie pour les sous-officiers du Québec.

Quels seraient les uniformes de l'armée du Québec?

L'armée du Québec devrait rapidement se doter d'un uniforme distinct de l'armée canadienne. Les composantes terrestres, aériennes et maritimes auraient le même uniforme, mais auraient des signes d'identification spécifiques aux différents métiers (ailes de pilotes, parachutistes, etc.).

Quels seraient les noms des grades militaires de l'armée du Québec?

L'armée du Québec aurait un système de grade militaire distinct de l'armée du Canada. Les noms des grades militaires serait le même que les armées occidentales (capitaine, sergent, général, etc.) mais des identifications visuelles distinctes seraient créées afin de distinguer les militaires québécois.

Un comité de vétérans et d'historiens serait formé afin de formuler des recommandations à cet effet.

Que faire pour le nom et les types de médailles?

Il serait important de créer un comité formé d'historiens, d'anciens militaires et d'universitaires qui créerait un système de décorations et honneurs propres au Québec. Ce système devrait à la fois reconnaître et témoigner de l'histoire et des traditions du Québec, tout en marquant sa singularité.

Il ne faudrait pas pour autant rejeter tout ce qui rappelle l'héritage de la Grande-Bretagne ou du Commonwealth, car ce passé fait partie intégrante de l'histoire du Québec.

À quoi ressemblerait l'armée du Québec indépendant?

Billet originalement publié sur le Huffington Post.

L'accession d'un État à l'indépendance pose plusieurs questions capitales, notamment celle portant sur l'armée du pays qui serait créé. Tout projet sérieux d'accession du Québec à l'indépendance doit donc aborder cette question et fournir des réponses étoffées au peuple québécois. Afin d'inviter les Québécois à débattre de cet important sujet, j'ai esquissé sous forme de questions-réponses un portrait d'une armée possible pour le Québec.

Divisé en trois parties, les réponses aux questions donnent un point de départ pour permettre les discussions sur cet important sujet. La première partie exposait la mission et les alliances de l'armée du Québec. Voici la deuxième partie où j'expose ce que serait la composition de l'armée du Québec. La troisième partie couvre la transition des Forces armées canadiennes à l'armée du Québec.

À quoi ressemblerait l'armée du Québec?

L'armée du Québec serait composée d'une force mobile légèrement armée, capable de se déplacer par voie aérienne et de se déployer dans une zone d'opération, n'importe où sur la planète. Elle aurait des soldats bien entraînés, mais peu nombreux, à l'image des forces spéciales. Avec au plus 9 000 soldats, cela permettrait de maintenir environ 1 500 soldats en opération dans un pays étranger. Il serait possible de les ravitailler à l'aide d'avions de transport et de les appuyer par des moyens héliportés et des avions légers comme des Super Tocano ou des AirLand Scorpion. La mobilité serait privilégiée à la protection (véhicule légers et rapides au lieu de chars lourds), car elle combine efficacité et économie de coût.

Cette force de soldats professionnels serait appuyée par une milice nationale ayant une présence dans les communautés (Régiment du Saguenay, Régiment de la Chaudière, etc.) et connaissant bien sa région. Cette milice serait composée d'un effectif entre 10 000 et 15 000 réservistes qui seraient équipés pour intervenir en cas de catastrophe naturelle. Ce type d'équipement serait moins dispendieux qu'un équipement militaire, car il n'aurait pas à répondre aux normes militaires (blindage, communications encryptées, etc.). Seules quelques centaines de réservistes seraient en service au même moment, avec un pic de quelques milliers pendant l'été, lors d'entraînements estivaux. Ces «garde nationaux» auraient également comme mission d'appuyer le noyau de professionnels dans le scénario improbable où le Québec devrait défendre sa souveraineté.

En résumé:
• De 6 000 à 9 000 soldats d'élite, dont un groupe de 1000 soldats toujours prêts à être déployés n'importe où dans le monde;
• Milice nationale impliquée dans sa communauté;
• Force de surveillance garantissant l'intégrité du territoire.

À l'armée de quels pays celle du Québec pourrait-elle être comparée?

En termes de soldats et de budget, l'armée du Québec serait comparable à celle de :
• La Nouvelle-Zélande: une force régulière d'environ 7 000 soldats (2,7 milliards $CA de budget).
• Les Royal Marines britanniques: une force d'élite de 8 500 soldats qui est une branche semi-indépendante de l'armée britannique. Ils sont reconnus pour avoir les soldats les mieux entraînés de la planète.
• La Légion étrangère française: 7 700 soldats d'élite (3 milliards d'euros, ou 4,3 milliards $CA, de budget).

De quel type d'équipement l'armée du Québec disposerait-elle?

Au moment de la création de l'armée du Québec, cette question ne serait pas primordiale.

Il faudrait plutôt mettre en place un processus d'acquisition d'équipement flexible et sortir des programmes d'armement qui s'étendent sur des dizaines d'années. Nos adversaires potentiels seraient probablement des organisations non-étatiques qui sont très flexibles et qui peuvent s'adapter rapidement aux changements technologiques. L'armée du Québec devrait avoir un processus d'acquisition pouvant s'adapter rapidement à cette évolution.

La question de la surveillance du territoire serait intimement liée à une force aérienne. Drones et avions de reconnaissance seraient au cœur de cette surveillance. Il n'y aurait pas d'avion de chasse et d'interception, ce qui permettrait d'économiser des sommes importantes.

La mission la plus importante de l'aviation serait le transport de troupes vers l'étranger. Une capacité de transport est aussi un élément qui pourrait donner de la visibilité au Québec lors de missions internationales. Cette capacité pourrait être utilisée pour déplacer des vivres et autre matériel nécessaire lors d'un soutien d'aide humanitaire. Les avions de transport sont rares et l'impact politique d'un avion québécois livrant des sacs de vivres à une population en difficultés, par exemple, serait marquant.

La marine prendrait la forme d'une garde côtière légèrement armée pour faire face à des éléments criminels, mais insuffisamment armée pour engager le combat contre des navires de guerre modernes. Encore une fois, la technologie de drones maritimes, équipés de radars, caméras infra-rouge et autres systèmes de surveillance, permettrait de surveiller le golfe du Saint-Laurent, évitant ainsi les coûts importants d'une marine militaire traditionnelle. La composante maritime pourrait transporter des troupes vers un théâtre d'opération extérieur et assurer la patrouille et la souveraineté du golfe du Saint-Laurent, notamment en le maintenant libre de glaces en hiver.

Il serait logique de mettre les services de recherche et sauvetage sous le commandement d'une force militaire, par souci d'économies. Les services de recherche et sauvetage pourraient alors bénéficier des ressources de surveillance militaire, à des fins de sauvetage.

L'armée du Québec auraient-elles des «Casques blancs»?

Ce n'est pas une question qui relève de l'armée du Québec.

Les «Casques blancs» sont souvent définis comme des troupes entraînées et équipées, mais non armées, pouvant se déployer à l'extérieur des frontières d'un pays afin de venir en aide à la population d'un autre pays. Or, une armée est par définition une force armée.

La proposition de doter le Québec de Casques blancs pour construire des écoles est porteuse, mais cette force ne devrait pas être sous la responsabilité du ministère de la Défense car elle n'est pas une force militaire. Cette force devrait être sous la responsabilité du département des affaires étrangères ou encore d'un département de l'aide extérieure du Québec, à l'instar de l'Agence canadienne de développement international (ACDI) dans le cas du Canada.

Selon les circonstances, les Casques blancs pourraient ainsi être déployés de manière indépendante, accompagnés dans leur transport par des militaires, ou encore protégés par ces derniers lorsque déployés dans un environnement hostile.

Qui serait le commandant en chef de l'armée du Québec?

Le commandant en chef de l'armée du Québec serait un civil, le chef d'État. Il serait le supérieur du chef de l'état-major de l'armée (un général ou un lieutenant-général, selon la structure militaire qui serait choisie).

Le titre précis du chef du gouvernement est lié à la structure politique de chaque pays, il en serait de même pour le Québec. Par exemple, au Canada, c'est la reine, représentée par le gouverneur général, qui est commandant en chef de l'armée, tandis qu'aux États-Unis et en France, c'est le président qui assume cette fonction.

Lettre aux Acadiens et aux francophones hors du Québec

Billet originalement publié sur le Huffington Post.

Lors de mes deux campagnes électorales comme candidat pour Option nationale (ON), il m'est arrivé à plusieurs reprises de discuter avec des Acadiens. Lorsque j'expliquais qu'ON militait pour l'indépendance du Québec, ils avaient pour la grande majorité une réaction négative. Ils m'expliquaient que l'indépendance du Québec allait affaiblir les communautés francophones hors Québec, que leurs communautés seraient encore plus rapidement assimilées.

Amis acadiens et francophones hors Québec, le Québec pays sera plus utile à la prospérité de vos communautés qu'il ne peut l'être à l'intérieur du Canada. Voici pourquoi.

Observons d'abord que la survie de la langue française au Canada est étroitement liée au nombre d'habitants et au pourcentage relatif de francophones dans chaque province. Moins il y a de francophones dans une province, plus l'assimilation vers l'anglais y est rapide. Le déclin des communautés francophones est présentement rapide et avancé dans la majorité des provinces, alors même que le Québec fait partie du Canada.

Constatons ensuite que le Québec n'a aucun rôle officiel dans la protection de la langue française dans les autres provinces. C'est à chaque gouvernement provincial, sur son territoire, de même qu'au gouvernement fédéral, d'assurer cette protection. Que le Québec soit présent dans cette fédération ne représente aucune garantie que les autres juridictions protégeront le français. C'est d'ailleurs une réalité qui se vérifie tout au long de l'histoire du Canada. Prenons par exemple le règlement 17 de l'Ontario, qui fut en vigueur de 1911 à 1927, interdisant l'enseignement en français au-delà des deux premières années du primaire. Ou encore plus récemment, en 2003, alors que le gouvernement néo-écossais s'est fait blâmer de ne pas avoir suivi l'ordonnance d'un juge acadien, qui le sommait de construire des écoles françaises pour les Acadiens. On trouve de tels exemples dans chacune des provinces du Canada.

La présence du Québec dans la fédération canadienne n'assure donc aucune protection pour les communautés francophones des autres provinces. Le Québec lui-même peine à mettre en place des mesures de protection de la langue, notamment parce qu'il est soumis à la constitution canadienne. Comment pourrait-il aider politiquement les autres communautés francophones?

Même si leur gouvernement est menotté, rappelons que les Québécois ont déjà soutenu de façon indirecte les francophones des autres provinces. Avant la Révolution tranquille, cela se faisait grâce à un réseau d'entraide parallèle mis sur pied par l'Église catholique. Ce mouvement religieux, représentant l'écrasante majorité des Québécois francophones, a joué un rôle essentiel grâce aux prêtres québécois ayant mis sur pied des écoles de langue française dans les autres provinces. Avec la laïcisation de la société, ce réseau n'a plus les moyens, ni la mission, de soutenir de tels projets.

Lorsqu'il sera un pays, le Québec disposera de représentations dans les États étrangers, y compris le Canada. S'ajoutera alors tout un réseau d'institutions inexistant dans le Québec-province. Ces institutions auront des ressources pour promouvoir les intérêts et les valeurs des Québécois. Et comme la langue française sera une pierre d'assise de ce nouveau pays, la promotion de cette langue sera sans aucun doute au cœur de ses mandats. Ce soutient pourrait prendre la forme, par exemple, d'un réseau d'éducation calqué sur le modèle des collèges français, les « collèges québécois », dans les provinces du Canada.

Amis Acadiens et francophones de toutes les provinces du Canada, pourquoi défendre l'intégrité d'un pays qui, depuis sa création, utilise les outils politiques qu'il possède pour forcer directement ou indirectement votre assimilation? En appuyant l'indépendance du Québec, vous favorisez la création d'un pays francophone en Amérique du Nord qui sera en mesure de vous aider à sauvegarder votre culture. Le Québec province ne peut à peu près rien pour vous, alors qu'un Québec pays possédera les institutions, les moyens financiers et le mandat de renforcer les communautés francophones.

La radicale clarté

Billet originalement publié sur le Huffington Post.

L'étiquette « radicale » est semblable à celle de « terroriste », en ceci qu'elle est toujours utilisée pour désigner l'autre, habituellement l'adversaire, mais n'est jamais utilisée par les personnes ou les groupes pour se désigner eux-mêmes. Cet étiquetage est en fait un outil de propagande redoutable, permettant avec un seul mot de réduire l'adversaire à un extrémiste, tout en positionnant l'émetteur comme un modéré.

C'est le sort qu'a connu Mario Beaulieu après son élection à la tête du Bloc québécois. Michel David avait déjà préparé le terrain deux jours auparavant en le qualifiant d'homme « pur et dur ». Dès lors, la table était mise pour qu'il soit identifié par la suite comme un « radical ». À preuve, cette entrevue de Radio-Canada où les journalistes traitent à cinq reprises Mario Beaulieu de « radical ». Quelle idée les journalistes ont-ils mise de l'avant? Mario Beaulieu est un radical.

Qu'a bien pu faire Mario Beaulieu pour mériter pareil épithète? C'est que l'homme a un message clair sur l'indépendance du Québec. Le Bloc doit servir à promouvoir l'indépendance du Québec, avant, pendant et après les élections.

Mais après plus d'une décennie de « stratégies » du Parti québécois et du Bloc pour séduire l'électorat, la clarté d'un message est maintenant considérée comme étant radicale. Voilà où nous en sommes. Or, proposer clairement un projet à une population ce n'est pas être radical, cela s'appelle simplement faire de la politique.

Cette course à la chefferie du Bloc est une répétition générale pour celle du PQ. La clarté sera taxée de « radicalité », de « ceinture fléchée », de « caribous » et d'une foule d'autres étiquettes visant à réduire le message, et le messager par le fait même, à une option déraisonnable. Cela fait près de 20 ans que le PQ a institutionnalisé le louvoiement comme stratégie vers l'indépendance, refusant aux Québécois de voter clairement pour prendre leur avenir en main. Près de 20 ans à tergiverser, cela laisse des traces. Il ne faut pas se surprendre que ceux qui ont le courage d'incarner un virage pour réaliser sans biais l'indépendance du Québec soient vus comme « radicaux ». C'est pour amorcer ce virage que Mario Beaulieu a été élu, notamment avec l'aide des jeunes à la tête du Bloc.

Nous en avons soupé de la stratégie, place à la clarté.

Déterminisme: de Laplace à Power Corporation

Billet originalement publié sur le Huffington Post.

Les scientifiques du 19e siècle ont particulièrement été marqués par la théorie du « déterminisme classique ». Dans sa forme la plus pure, énoncée par le physicien et mathématicien Pierre-Simon de Laplace, cette théorie veut que l'état d'un système à un instant donné dépende de ses états précédents. Ou dit autrement, l'avenir comme le passé sont prévisibles si l'on connaît le moment présent.

Bien que populaire pendant près d'un siècle, cette théorie s'est vue contredite au 20e siècle par deux découvertes. D'abord par l'effet papillon, qui démontre qu'une perturbation infime des conditions initiales peut avoir des conséquences imprévisibles à long terme. Puis par la mécanique quantique, qui implique que le hasard, ou l'inconnu, fait partie intégrante de la nature. On ne peut donc parfaitement prédire l'avenir, peu importe la connaissance que nous avons sur le moment présent. C'est d'ailleurs pour cela qu'il sera toujours impossible d'avoir une prévision météo parfaite!

Le déterminisme est toujours populaire au 21e siècle. Il a quitté le milieu de la physique pour le domaine de la politique. Beaucoup de gens œuvrant dans ce milieu prennent en effet pour acquis que si on connaît avec assez de précision une population, essentiellement grâce aux résultats d'élections, aux sondages et à la démographie, il est possible de prévoir son comportement politique, ou encore mieux, de l'influencer à partir de cette information.

Lorsque Power Corporation utilise sa branche médiatique en qualifiant abusivement de « grand sondage » un sondage non scientifique indiquant que les jeunes ne sont plus indépendantistes, ce n'est pas une mesure de la population. C'est une tentative pour que les déterministes politiques de tout acabit concluent que l'avenir du Québec est joué, qu'il se déroulera dans le cadre fédéral canadien. C'est cette vision de l'avenir que promeut Power Corporation et la publication de ce sondage ne fait que renforcer sa ligne éditoriale.

Or, bien que le contexte présent puisse expliquer une partie de l'avenir d'un peuple, il ne le détermine pas. Les changements dans une société peuvent survenir de façon imprévisible, comme le printemps érable, et être au départ invisible pour la société, invisible pour les sondages, invisibles pour les analystes et autres mesureurs de population.

Il faut briser cette habitude d'analyser les chiffres comme s'ils déterminaient l'avenir du peuple québécois. Nous retirons ainsi un pouvoir des mains de toutes les Power Corporation de ce monde qui désirent maintenir le statu quo. Un peuple conscient de son potentiel est un peuple qui réclame sa liberté. Or, c'est en bridant l'éveil de nos capacités que nous demeurons un peuple conquis et satisfait. Ceux qui traitent les Québécois de faibles, de BS, de quêteux sont dans leur majorité des défenseurs de l'ordre établi, du fédéralisme. Écoutons plutôt ceux qui nous disent grands, ceux qui nous disent forts. Le jour où nous aurons réalisé notre propre valeur, celle de notre grandeur en tant que peuple, ce jour-là nous serons libres. Et dès le lendemain nous le ferons, ce pays qui n'attend que nous.

En attendant le Messie

Billet originalement publié sur le Huffington Post.

On me dit souvent, lorsque je discute indépendance avec des amis, que les problèmes du Québec se régleront avec l'arrivée d'un chef charismatique - René Lévesque est toujours donné en exemple - qui par sa simple parole unira les Québécois et les amènera au pays rêvé. Or, la théorie du Messie politique est erronée, ce sont les événements de l'histoire qui créent les chefs et non l'inverse.

Il est important, dans un premier temps, de remettre en contexte l'oeuvre politique de René Lévesque. Il est sans l'ombre d'un doute un grand homme politique québécois, mais il est faux de penser qu'il n'a eu qu'à se présenter et que les Québécois le suivaient dans tout ce qu'il proposait. Il a été actif en politique pendant 27 ans et a eu des succès extraordinaires comme la nationalisation de l'électricité et l'élection du Parti québécois en 1976. Mais il faut également souligner qu'il a connu des échecs, que ce soit lors des élections de 1970 ou encore le référendum de 1980. De plus, la population québécoise n'a pas toujours été derrière lui, bien au contraire. En janvier 1983, par exemple, quelque 30 000 syndiqués défilent devant l'Assemblée nationale et brûlaient des mannequins à son effigie. Il démissionnera en 1985, poussé à la porte par plusieurs membres de son caucus.

Le temps qui passe gomme les difficultés du parcours de René Lévesque de notre mémoire collective, ne laissant que les grands moments. Si bien que 25 ans après sa mort, il nous reste l'impression qu'il n'avait qu'à parler pour que le peuple emboîte le pas dans son projet politique. Or, cela n'a jamais été le cas, il a travaillé sans relâche, a connu des moments extrêmement difficiles et il est apparu dans un contexte où la société avait soif de changement et avait la démographie, grâce à l'arrivée de la génération des baby-boomers, pour appuyer ces changements.

Ce sont les événements qui révèlent les chefs. Ceux qui feront du Québec un pays sont autour de vous, ils travaillent chaque jour d'arrache-pied pour lui donner son indépendance. Ce n'est pas un seul homme ou une seule femme qui, par sa seule parole, fera la différence. Lorsque le peuple se mettra en marche, animé de la volonté de changer le parcours politique monotone du Québec, les nouveaux chefs émergeront et mèneront la population. N'attendons pas le moment où la personne opportune, c'est à nous tous de libérer le Québec, maintenant.