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Ma mère n'est pas une pirate

Ma mère, contrairement à moi, a la télévision par câble. À chaque fois qu'une émission de télévision, film, documentaire ou autre, est diffusée et qu'elle croit qu'elle pourrait m'intéresser, elle me l'enregistre sur une bonne vieille cassette VHS. La première fois que j'ai rencontré le concept de circulation thermohaline, c'est dans une émission que ma mère m'a enregistrée.

Ma mère m'enregistre des émissions et me prête ou me donne une cassette lorsque je vais la visiter. Tout ceci est entièrement légal.

Moi, contrairement à ma mère, j'ai une connexion internet haute vitesse. À chaque fois que je visionne un vidéo téléchargé sur internet, film, documentaire ou autre, qui serait succeptible de l'intéresser, je le garde sur mon disque dur et je les grave ensuite sur un bon vieux disque DVD.

Je grave un DVD des vidéos et je lui prête ou lui donne un DVD lorsque je vais la visiter. Tout ceci est entièrement illégal.

Pourquoi une telle différence dans la législation alors qu'à la base, il s'agit exactement du même acte? Devrait-on baser l'esprit de la loi sur les moyens technologiques? C'est ce qui est fait en ce moment. Mon crime est de me servir d'internet comme source. Ma mère utilise la télévision comme source, ce qui est parfaitement dans son droit.

Ma mère n'est pas une pirate, moi si.

Cathédrales sur sable mouvant

Suite du billet Internautes, du haut de ces octets, quarante siècles vous contemplent.

La recherche de textes traitant d'un sujet à l'époque pré-internet était beaucoup plus laborieuse qu'aujourd'hui.

Au XXe siècle, si l'on désirait s'informer sur le traitement qui avait été fait d'un sujet dans l'actualité, il fallait se déplacer physiquement pour consulter les microfilms des journaux et magazines.

On pourrait croire qu'avec le moyen de diffusion extraordinaire qu'est internet, les médias traditionnels ont sauté sur l'occasion pour mettre leurs archives en ligne ou, au minimum, les textes publiés depuis qu'ils ont pignon sur le web. Or, il n'en est rien. Leurs traces disparaissent parce qu'inaccessibles.

Si vous faites une recherche sur un sujet donné, les billets des blogues traitant de ce sujet vont fort probablement ressortir au haut de la liste des résultats, beaucoup plus souvent qu'un article de journal, si prestigieux soit-il. Pourquoi? Parce que le contenant des blogues est conçu de telle sorte que le contenu puisse être lu par le plus grand nombre de personnes. Ils suscitent la discussion, les débats et donc le référencement par des hyperliens. Toutes des qualités que n'ont pas la grande majorité des médias traditionnels, sous prétexte d'une possibilité de profit supplémentaire grâce à une seconde vente de ces articles.

Le débat à savoir si les blogueurs sont des journalistes ou non prend dès lors une toute autre saveur. Je ne suis pas un journaliste, je ne le revendique pas de toute façon, mais le texte que vous lisez présentement sera très probablement toujours librement accessible sur internet. Pas disponible sur CEDROM SNI contre 4$ avec une unique phrase pigée au hasard dans le texte pour tout résumer. Et l'impossibilité d'utiliser un hyperlien y menant pour que le lecteur puisse constater par lui-même ce dont vous parlez, plutôt que vous fier à ce que vous en dites.

Certes, ces articles pourront peut-être un jour se retrouver dans le domaine public, mais combien de décennies cela prendra-t-il? S'il y a un débat à faire sur un sujet, il y a plus de chances qu'il survienne dans les années qui suivent sa publication plutôt que dans les siècles suivant. Si discussion il y a, il y aura référencement, c'est-à-dire hyperliens. Donc, s'il y a recherche sur ce sujet par la suite, qu'est-ce qui se retrouvera en premier dans les résultats?

Bien sûr, si on se projette dans 100 ans et qu'une personne cherche le traitement d'un sujet dans une publication en particulier, elle saura le trouver. Mais cette technique date du XXe siècle, aucun avantage de la technologie n'est utilisé.

Les médias traditionnels se trouvent à être d'éphémères chroniqueurs: ils ont un impact précis dans le temps et, souvent, dans l'espace. Si tôt l'événement passé, leurs textes vont se retrouver dans les catacombes de la propriété intellectuelle. Le savoir-faire, le talent et la qualité sont très souvent présents dans ces publications mais, tristement, elles sont appelées à disparaître de l'horizon peu de temps après leur édification. À moins d'être un archéologue avec une carte détaillant précisément où trouver ce qu'il recherche, personne ne retrouvera ces textes. Les médias traditionnels construisent des cathédrales sur des sables mouvants.

Note: Dans le même ordre d'idée que ce texte, je vous invite à lire De la distribution du code source dans les publications scientifiques.