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Les billets de transfert du métro de Montréal

Je rentrais tranquillement dans le métro pour aller au boulot lorsque je vis un monsieur du métro qui avait 3 grosses roulettes, roulettes qu'il s'apprêtait à mettre dans la machine pour distribuer les billets de transferts. C'est la première fois que je voyais d'où venaient les billets avant d'être coupés et imprimés.

Je ne fais ni une ni deux, je sors mon appareil et je lui demande si je peux prendre une photo. Un peu hésitant, il finit par accepter.

Deux roulettes de billets de transfert du métro de Montréal sur la machine qui les dispense

Et là, il me dit d'en profiter parce que dans un mois, les billets de transfert en papier auront disparu. L'histoire ne dit pas par quoi ils vont être remplacés.

Profitez-en lors de votre prochain voyage dans le métro, prenez-vous un souvenir!

Billet de transfert en papier du métro de Montréal

Les nombres

J'étais dans l'autobus, en pleine introspection. Je me demandais qu'est-ce qui, à la base, me choquait le plus dans l'utilisation du refroidissement éolien. Je lève les yeux et, je vois la réponse m'apparaître sur la première page du 24 heures:

Première page du 24 heures, édition du jeudi 7 février 2008. On y voit une photo avec le titre «52 morts».

Étonnement. Le gros titre n'indique que le nombre de morts: 52. On ne sait pas de quoi il s'agit. Ce qui compte, c'est le nombre de morts.

C'est à ce moment que j'ai réalisé. C'est l'utilisation des nombres. C'est la réduction de situations complexes à des nombres. De préférence un seul.

Le meilleur exemple qui me vient en tête est celui de la présence canadienne en Afghanistan. Combien de fois le nombre de soldats canadiens morts en Afghanistan est-il évoqué? Vous voulez voir le ridicule de la chose? Le 22 août 1914, durant la Première Guerre mondiale, 27 000 soldats français furent tués. 27 000 morts une journée! Fait que si on résume la présence canadienne en Afghanistan à 73 soldats et 1 diplomate tués, on ferait mieux de ne pas en parler. À quelque part, ça doit vouloir dire que les enjeux doivent être d'une autre nature.

L'utilisation qui est faite des sondages est un autre bon exemple. Qu'est-ce qu'un sondage sinon une avalanche de nombres qui tente de décrire une situation? Il arrive souvent que l'on fasse un sondage sur ce que pense la population d'un enjeux, sans débat ni diffusion d'information, et que l'on se tourne vers les politiciens avec ces résultats en main. Un exemple concret: 40 % des Québécois pour l'abolition des commissions scolaires.

C'est aussi ça, le refroidissement éolien et le facteur humidex, une réduction de la réalite à un nombre.

Les mathématiques, auxquelles j'associe les nombres, ont été inventés pour aider à comprendre la réalité. Pas pour réduire la réalité aux mathématiques.

Le Q des vieux

Je me souviens, lorsque j'étais un jeune Miguel, ma mère était très drôle lorsqu'elle épelait des mots avec la lettre « Q ». Elle ne disait pas « cul » ( [ky] en phonétique) pour prononcer cette lettre mais bien « que » ( [ke] ).

C'est que la prononciation de la lettre Q était considérée trop vulgaire. L'Église, à l'époque où ma mère apprenait à épeler les mots, avait la main mise sur le domaine de l'éducation (en grande partie grâce à Maurice Duplessis). Elle décida donc de renommer la lettre « cul » en « que » pour éviter d'entendre trop souvent ce mot impur. En France, les écoles bien-pensantes disait plutôt « qué » ([ké]).

Imaginez la puissance de l'Église au Québec, suffisament puissante pour renommer une lettre de l'alphabet! Ce nouveau nom restera jusqu'à la Révolution tranquille moment où l'Église sera forcée de relâcher son emprise sur l'éducation du peuple Québécois.

La lettre Q telle qu'on la connaît, nous les jeunes, a été baptisée de la sorte par Ramus (1515-1572). Il proposa aussi une réforme qui différenciait les lettres U et V ainsi que les 3 e: e, é, è. La lettre Q est toujours suivie de la lettre U dans la langue française, sauf pour 2 mots qui finissent par cette lettre: coq et cinq.

Sources:
* Le genre des lettres;
* Pierre de La Ramée (Ramus);
* Office québécois de la langue française, Banque de dépannage linguistique, Graphies du son [k];
* Discussion au téléphone avec maman, dimanche 20 janvier 2007, vers midi.

Un peu de Frank Zappa

Extrait d'un article sur les visionnaires du magazine Jobboom signé Jean-Sébastien Marsan:

En 1983, le compositeur américain Frank Zappa a sollicité un appui financier de la part de la société de capital de risque Rothschild Venture Capital. Le musicien avait conceptualisé un système de téléchargement de pièces musicales, numérisées ou analogiques, par téléphone ou par câble. L’industrie du disque vinyle disparaîtra un jour, plaidait Zappa. «Les consommateurs de musique consomment de la musique […] et pas spécialement des articles de vinyle dans des pochettes en carton.» Rothschild Venture Capital a rejeté le projet… Frank Zappa a été emporté par un cancer en 1993, peu avant l’explosion du téléchargement de musique au moyen d’Internet.

Source de la citation : Zappa par Zappa, Editions de l'Archipel, Paris, 2000, ISBN 2-84187-226-2, p. 360

Maurice Duplessis et l'éducation religieuse

Voici un discours de Maurice Duplessis, fait à Sainte-Anne-de-la-Pocatière en 1959, portant sur le rôle de l'Église dans l'éducation.

Voici la transcription de son discours (l'hyperlien est de moi):

Monseigneur, il me fait plaisir comme premier ministre de la province, comme citoyen, et je suis sûr de représenter l'opinion de tout le monde ici, de remercier notre clergé, le clergé du diocèse, pour le rôle indispensable qu'il a joué dans tous les paliers, à tous les paliers de l'enseignement et particulièrement dans le domaine de l'enseignement agricole.

Ils font erreur, grave erreur, ceux qui préconisent la neutralité de l'enseignement. Il ne peut être question de neutralité entre le vrai et le faux, entre le bien et le mal! Il ne peut être question de neutralité dans le domaine de l'éducation parce que la principale lumière, qui répand de la vie, qui permet de voir dans le domaine éducationnel, c'est la lumière éternelle!

Ça me renverse qu'il ait fallu attendre à septembre 2008 pour que l'école soit finalement laïque. Des fois ça prend du temps, faut croire.

Je tiens, sincèrement et chaleureusement, à rendre hommage aux personnes qui ont mené ce combat au cours de toutes ces décennies pour sortir la religion du système de l'éducation.

Qu'est-ce que remplacera les cours de religion? Écoutez la réforme de l'enseignement religieux, une entrevue à la radio de Radio-Canada de Georges Leroux, professeur de philosophie à l'UQAM.

Le premier lustre de ptaff.ca

Ça vas-tu vite rien qu'un peu? ptaff.ca, ce projet collaboratif où nous mettons le meilleur de nous-mêmes, aura très bientôt 5 ans. ptaff.ca, c'est des centaines de milliers de visiteurs venant de partout sur la planète, des centaines de courriels et d'innombrables conversations enrichissantes.

Nous avons, pour cette occasion, créé un petit quiz intitulé « connaissez-vous votre ptaff.ca? ». Par ici pour connaître la réponse :
//ptaff.ca/lustre/1/quiz/

De plus, nous tenons à souligner ce premier lustre en vous invitant, vous chers amis et lecteurs, à venir nous serrer la pince le jeudi 24 janvier à 19 h au Tap Room, 500 Rachel E. Si vous avez des questions sur ptaff.ca, si vous vous ennuyez terriblement de nous ou que vous désirez simplement savoir si nous existons pour vrai, c'est l'occasion rêvée!

Vos héros du réseau,

Wayne et Miguel

La mouvante capitale du Canada

En lisant les Contes, légendes et récits de l'Outaouais de Martin Frigon, un paragraphe m'a parut d'une limpidité remarquable. Ce paragraphe résume en quelques phrases un pan important de l'histoire canadienne: le déménagement à Ottawa de la capitale du Canada.

C'est tellement bien tourné que je ne peux m'empêcher de le recopier ici, comme aide-mémoire et pour fin de référence. Et un peu pour vous aussi, tiens.

Ottawa ou Outaouais, selon qu'on adopte l'orthographe anglaise ou française (on conserve ordinairement la première quand il s'agit de la ville, reprenant la seconde pour la rivière), est une cité tout à fait nouvelle, qui doit son rang et sa fortune un peu à sa position stratégique et beaucoup aux prétentions discordantes des trois ou quatre capitales que s'est données successivement le Canada. Pendant les premiers temps qui suivirent l'union plus ou moins forcée des deux provinces Supérieure et Inférieure (1840), Kingston avait été la résidence du gouverneur de du Parlement. En 1843, l'un et l'autre se transportèrent à Montréal. En 1849,le parti conservateur anglais, le gouvernement de lord Elgin en faveur des victimes de l'insurrection bas-canadienne de 1837, souleva la populace anglaise de la ville. Le « mob » envahit le palais du Parlement qui fut livré aux flammes avec sa riche bibliothèque par ces émeutiers soi-disant loyalistes. La capitale fut alors transportée à Toronto mais le Bas-Canada réclamant sa part d'hégémonie, il en résulta un gouvernement nomade qui devait résider par périodes égales à Toronto et à Québec. Vers 1858, chacun réclamait contre les inconvénients de cette constitution bicéphales ; mais les localités rivales maintenaient plus que jamais leurs prétentions particulières à rester ou à redevenir le siège du gouvernement. En désespoir de cause on s'adressa à la métropole, et celle-ci, à la grande surprise de tous, trancha le procès en faveur d'une petite ville située dans une région à peine envahie par les défrichements et qu'on ne connaissait guère alors que sous le nom de Bytown, qu'elle avait reçu du colonel By, son fondateur. Le cabinet de Londres s'était décidé par des raisons stratégiques. Assise sur la rivière Outaouais, à la tête du canal Rideau, possédant par conséquent des voies de communication indépendantes du caprice comme du canon des Yankees, la nouvelle capitale se trouvait, en cas de guerre, à l'abri d'un coup de main. Les Canadiens se soumirent, non sans murmurer quelque peu, à la décision métropolitaine; et dix ans après, Ottawa, enrichi de monuments en rapport avec sa nouvelle situation, monta encore en dignité en devenant, par l'union de toutes les colonies britanniques de l'Amérique septentrionale, la capitale d'un empire aussi vase que l'Europe, entière, quoiqu'il ne contienne encore que quatre millions d'êtres humains, parmi lesquels un million deux cent mille environ, Canadiens, Acadiens ou métis Français représentent la race te la langue des premiers colonisateurs de la Nouvelle-France.

Référence: CONTES, LÉGENDES ET RÉCITS DE L’OUTAOUAIS, Martin Frigon, ÉDITIONS TROIS-PISTOLES, Chez les Français d'Amérique, H. De la Motte, p. 305-306

Lecture complémentaire: Martin Frigon raconte l'Outaouais (Cyberpresse)

L'obscurantisme de l'ADISQ

Ce billet est une réponse à la proposition de l'ADISQ au CRTC pour créer une loi (ou un règlement) afin que tous les octets qui circulent sur l'internet canadien soient contrôlés.

Le contrôle d'internet au Canada

Pourquoi contrôler internet au Canada? Pour faire en sorte que les octets transportant un contenu canadien aient priorité sur les autres. Pour que la culture canadienne, sans parler de l'exception québécoise, ait priorité sur tout le reste.

Si les octets du contenu canadien vont plus vites, c'est donc que les autres sont ralentis. L'ADISQ prêche donc contre la neutralité des réseaux.

Selon l'ADISQ, il n'y a pas de difficulté technique puisque la Chine exerce déjà un contrôle sur internet à l'intérieur de ses frontières pour censurer le contenu étranger. Le Canada, après la Chine, devrait donc être le deuxième pays à contrôler internet sur son territoire.

Les dangers de la nouveauté

Les théologiens saint Augustin et Saint Thomas d'Aquin se méfiaient de ce que la curiosité pouvait faire aux fidèles. En effet, la curiosité pouvait faire en sorte que l'Église perde son pouvoir, menant les hommes vers des sphères de connaissances hors de son pouvoir1. Au Moyen Âge, l'Église avait plutôt une position contre la curiosité et les débats qui en découlaient. L'intelligence devait être utilisée pour la contemplation divine, non pour la recherche stérile de frivolités temporelles2. L'Histoire donna raison à leurs craintes, les Lumières mettant un frein à la souveraineté de l'Église sur la pensée en Europe.

Lors de la découverte du Nouveau Monde, une pensée émise par Jean de Léry dans son récit de voyage au Brésil, Histoire d'un voyage faict en la terre du Brésil (1578), fait le tour de l'Europe:

comment croiront-ils ce qui non seulement ne se peut voir qu'à pres de deux mille lieues loin du pays où ils habitent, mais aussi choses si esmerveillables et non jamais cognues, moins escrites des Anciens qu'à peine l'experience les peut-elle engraver en l'entendement de ceux qui les ont veuës ?

L'idée qu'il y ait des choses n'ayant jamais été connues par les Anciens (les sages de l'Antiquité) secoue le monde intellectuel de l'Europe. En effet, tout au long du Moyen Âge, on croyait que tous les phénomènes naturels, tous les animaux et toutes les sensations étaient connus et discutés par les Anciens. Tout le reste n'était qu'une nouvelle interprétation de ce qui était déjà connu.

Montaigne lui-même, que l'on ne peut accuser d'avoir été contraint par l'Église dans sa pensée, croyait que de s'intéresser aux nouvelles connaissances apportées du Nouveau Monde était un défaut, puisque cette curiosité faisait en sorte que l'on touchait à tout, mais que l'on en comprenait rien1.

Conclusion et Francis Bacon

Toute cette revue historique pour illustrer que l'ADISQ prône un retour en arrière. Ils tentent de barrer la route aux nouveaux moyens de communication, lire internet, en forçant une législation qui imposera l'ancien ordre des choses.

Ce n'est pas la première fois que l'arrivée d'idées nouvelles est combattue par les puissances en place. C'est ce que je tente d'illustrer par ma comparaison avec l'Église au Moyen Âge face aux connaissances apportées du nouveau monde.

Je terminerai par une citation de Francis Bacon, publié en 1620 dans son Novum Organum, en réponse à ces réfractaires aux nouvelles idées:

It would… be disgraceful, to mankind, if, after such tracts of the materials world have been laid open which where unknown in former times – so many seas traversed – so many countries explored – so many stars discovered – philosophy, or the intelligible world, should be circumscribed by the same boundaries as before.

Traduction de moi:
Il serait… déshonorant pour l'humanité, qu'après que de tels chemins, inconnus auparavant, au monde matériel aient été parcourus – tant de mers franchies – tant de pays traversés – tant d'étoiles découvertes – la philosophie, ou le monde intelligible, soit circonscrite par les mêmes frontières qu'avant.

Il semble que la blogosphère réagisse à l'unisson face à la proposition de l'ADISQ. Pleins de liens vers d'autres billets traitant du même sujet sur le blogue de Michel Dumais.

1:To Have and To Hold, Allen Lane, ISBN 0713994762, p.19-20
2: Raymond Klibansky, Erwin Panofsky und Fritz Saxl: Saturn und Melancholie - Studien zur Geschichte der Naturphilosophie und Medizin, der Religion und der Kunst. Suhrkamp, Frankfurt a.M. 1990. ISBN 3518286102.

La première colonie polonaise au Canada

Quelque part entre Ottawa et le parc Algonquin, nous eûmes la surprise de voir l'écriteau « Canada’s first polish settlement » (Première colonie polonaise du Canada).

Écriteau de la première colonie polonaise du Canada

Grand étonnement de ma part parce que nous étions vraiment loin à l'intérieur des terres de l'Ontario et qu'il n'y avait pas de moyen pour se rendre là aisément, hormis peut-être le chemin de fer, aujourd'hui inexistant.

Saisie d’écran de Google Maps centré sur Kaszuby

La colonie était dans la région de Barry’s Bay et avait pour nom Kaszuby, du nom de l'éthnie de Pologne d'où provenait les premiers colons. Ils sont venus au Canada en 1858, donc avant le chemin de fer, en répondant à la promesse de l'armée Britannique qui allait comme suit (NdA: Traduction et hyperliens de moi):

Cent acres seront données à tout colon de dix-huit ans et plus […] qui pourra rendre propre à la culture au moins douze acres de terre dans une période de quatre ans […] ériger une maison d'au moins 20x18 pieds et habiter sur la terre jusqu'à les conditions de la colonie soient dûment remplies.

One hundred acres will be given to any settler eighteen years old…who will put in a state of cultivation at least twelve acres of the land in the course of four years…erect on it a house at least 20x18 feet and reside on the lot until the conditions of settlement are duly performed.

On décide de s'arrêter à Barry’s Bay pour dîner. Juste à côté de nous, une réplique miniature du Avro Arrow, fameux projet d'avion de chasse de la RCAF abandonné en 1959.

Avro CF-105 Arrow
Photo de l’emblême de la RCAF

Au pied du Arrow, des fiches d'information nous apprend que le pilote d'essai de l'avion canadien était… Polonais. Il s'agit de Janusz Żurakowski qui une fois le projet du Arrow abandonné, s'installa à Barry’s Bay où il construisit le « Kartuzy Lodge », une petite résidence touristique que sa famille exploita pendant plus de 40 ans.

Statue de Janusz_Żurakowski

Tout ça dans le nord de l'Ontario!

Référence: The first Polish settlement of Kaszuby, Northern Ontario

Le programme d'histoire au Québec et le rôle du Canada dans le monde

Axiome: Les connaissances que l'on a sur un sujet influence notre opinion face à un enjeux impliquant ce même sujet.

L'État fournit une éducation de base obligatoire pour tous les citoyens. Au Canada, l'éducation est une compétence provinciale, il en revient donc au gouvernement du Québec de déterminer quelle forme prend cette éducation et quel est sont contenu. La formation de base à laquelle les citoyens doivent se présenter sont les niveaux d'école primaire et secondaire (quoiqu'il n'y ait pas de critères obligatoires de succès à aucun des paliers).

Ce qui est enseigné à ces niveaux se trouve dans ce que l'on nomme les programmes. Ceux-ci sont créés par le ministère de l'éducation. Les programmes sont une incarnation tangible de ce que le gouvernement estime essentiel au niveau du savoir, de la connaissance, et plus récemment des compétences.

Je tiens à m'attarder plus précisément sur l'enseignement de l'histoire au niveau du secondaire au Québec, c'est-à-dire sur les connaissances que devraient posséder la majorité de la population Québécoise. Cet enseignement va changer avec la réforme sur l'éducation, les propos qui suivent tiennent pour les gens ayant fréquenté l'école secondaire entre 1982 (date de mise en application des programmes) et 2007, et possiblement avant.

Il y a 2 cours d'histoire au secondaire, un premier en secondaire II (les élèves ont environ 13-14 ans) et un second en secondaire IV (15-16 ans).

Le cours d'histoire du secondaire II est un cours d'« histoire générale », c'est d'ailleurs le titre du programme. Ce cours couvre la période allant de la préhistoire jusqu'au XXe siècle. Il y a un module, le dernier, qui s'intéresse au XXe siècle. Il a pour titre le siècle actuel et a pour but « de comprendre les aspects de la continuité et du changement au siècle actuel ». Dans ce module, l'élève apprend « le lien entre les changements technologiques et l'évolution récentes des sociétés occidentales ».

Ce premier cours apprend donc à l'élève les grands pans de l'histoire (préhistoire, Antiquité, moyen-âge, etc.). On effleure le XXe siècle et ceci pour situer la société occidentale dans le monde. Ce survol est macroscopique.

Le cours d'histoire du secondaire IV est un cours sur l'histoire du Québec et du Canada. Ce programme, tout comme le cours d'histoire générale, est divisé en 7 modules. Il n'y a que le dernier module (le module 7) qui traite du Québec contemporain, (de 1939 à nos jours) et que la troisième partie du dernier module (7.3) qui parle de l'époque allant de la Révolution tranquille à aujourd'hui. Cette dernière partie a fait l'objet d'une révision en 1998.

Première constatation: le traitement de l'histoire du Canada s'arrête en 1840 avec l'Acte d'Union. Il n'est alors plus question du Canada, si ce n'est que pour y situer les revendications du Québec. Le cours devrait plutôt s'intituler « Histoire du Québec », le Canada n'étant vu que comme un cadre historique où le Québec se situe.

Deuxième constatation: il y a un quinzième (1/15) de tout le contenu du deuxième programme, et donc de tout le programme d'histoire du secondaire, qui couvre l'histoire du Québec allant de 1960 au moment où la personne suit ce cours d'histoire (entre 1982 et 2007).

Troisième constatation: tout au long du cours d'histoire du Québec et du Canada, l'enseignement est polarisé par la division que j'appellerai, par convention, linguistique. Le programme est divisé en 3 parties: le régime français, le régime britannique et la période contemporaine.

Regardons plus attentivement la section « Aspect politique » de la section 7.3 du programme. Si on écarte la question linguistique et le nationalisme, dans lequel j'inclus la question constitutionnelle, il reste 2 points: la consolidation du Québec dans le monde et les revendications autochtones. Pour ces 2 points, on parle de moins de 2 heures de classes, dans le meilleur des cas.

Tout le programme d'histoire de secondaire IV est tourné vers l'intérieur des frontières, essentiellement celles du Québec. Il n'y a pas de place pour le rôle qu'a joué le Canada et le Québec dans le monde au XXe siècle. Rien sur l'histoire militaire (guerres mondiales, guerre de Corée), rien sur le rôle du Canada dans la guerre froide (création des Casques Bleus), rien sur le rôle du Canada dans les traitées de libre-échange ou sur tout autre position économique, politique ou sur tout autre enjeux mondial.

Conclusion

Je fais cette analyse non pas pour critiquer la manière dont a été enseigné l'histoire au Québec durant les 25 dernières années, mais pour mettre en lumière que cet enseignement de l'histoire est tournée vers l'intérieur des frontières et mets l'accent principalement sur la problématique Québec-Canada, anglais-français.

Lors des prises de positions du peuple Québécois, celui-ci a tendance à être isolationniste, à minimiser ou négliger le rôle que le Canada ou le Québec pourrait avoir dans le monde. On peut se demander si l'histoire telle qu'elle est enseignée est un reflet de cette vision ou si elle en est en partie la cause. Si les Québécois sont incapables de se visualiser dans le monde, toute implication de celui-ci dans une cause de cet ordre peut-être vue comme une perte de temps, de ressources et d'énergie.

Chose certaine, le programme d'histoire tel qu'il a été enseigné entre 1982 et 2007 ne donne aucun élément pour être capable d'appréhender le rôle que le Canada/Québec pourrait avoir dans le monde. Seulement un très bon aperçu du conflit linguistique qui l'afflige.

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