Tirer un trait sur le PQ
Billet originalement publié sur LaPresse+ dans une version légèrement modifiée.
L’Office national du film a rendu disponible sur le web le documentaire Pauline Julien, intime et politique. J’y ai découvert une grande voix, qui m'a rappelé celle d’Edith Piaf. Je ne connaissais pas les détails de la vie de Pauline Julien, comme les circonstances de son ascension en France, où elle chantait Vigneault et y recevait plus de succès que chez elle, au Québec.
J'ai ensuite retrouvé dans le récit de sa vie un schéma similaire à celui de nombreuses personnalités québécoises de cette génération, dont deux nous ont quittés dernièrement :Lise Payette et Bernard Landry. Un parcours que l’on pourrait qualifier de « classique » dans l’histoire québécoise de la fin XXe siècle, du moins pour les nationalistes : prise de conscience de la québécitude, implication politique, Samedi de la matraque, fondation du Parti québécois (PQ), Crise d’octobre, prise du pouvoir du PQ, et défaites aux référendums de 1980 et de 1995.
Ma conscience politique s'est éveillée dans le sillage de cette trame historique. Je dois maintenant confesser que dans ma soif de connaissances du nationalisme québécois, j'évite ce qui concerne la fin du XXe siècle. La raison est simple : je suis tanné d'être triste. Car je ressens au plus profond de mon être que ces défaites, si bien incarnées par les gens du Camp du oui en pleurs au soir du référendum de 80, sont celles de mon peuple, donc un peu les miennes. Je partage le sentiment de Gérald Godin qui, au soir de la défaite en 1980, était triste car il « [voyait] un peuple qui refusait son avenir, sa vie et sa liberté, […] un peuple qui renonçait à vivre ».
Et puis, je pense à la cinglante défaite électorale que vient de subir le PQ, vaisseau amiral de cette époque révolue. À ces grilles d’analyse myopes qu’on utilise expliquer cette dérive : remise de l’option aux calendes grecques, déficit zéro, charte des valeurs, plateforme trop à gauche, ou encore Lisée tentant de débusquer le chef de QS.
Et je me dis, dans le fond, peu importe les causes. La disparition du PQ est peut-être nécessaire, souhaitable, afin de nous libérer de cet historique d’échecs. Afin de nous permettre de mettre définitivement cette époque derrière nous.
Je ne propose pas de renier l’histoire; ces échecs font partis de notre passé, elles sont tissées dans la trame historique de notre peuple. Mais cela permettrait de tracer une ligne, de distinguer un « avant » et un « après » ces refus du peuple québécois de venir au monde.
Nombreux sont ceux qui s’opposent à une telle fin, souvent avec véhémence. Les militants de cette époque, encore vivants aujourd’hui, de même qu’une certaine jeunesse, composent la force active du PQ. Cela se reflète dans le nombre de membres et dans le financement populaire du parti.
Mais il faut être lucide et constater que cette mobilisation n’a plus d’écho dans l’électorat, depuis longtemps déjà. Ne serait-il pas salutaire de changer d’embarcation, plutôt que de « ramer à contre courant », pour reprendre l’image de Jean-François Lisée dans son amer discours de défaite?
Certains militants ont déjà trouvé leur place à QS. Mais pour d’autres, ce parti ne peut être une voie acceptable. Je comprends et respecte cela. Pour ceux-ci, je leur souhaite de trouver une structure qui conviendra – peut-être dans la refondation du PQ dont il est question depuis quelques années – et qui leur permettra de poursuivre leur promotion de l’indépendance.
Ainsi redistribués dans d’autres partis et structures, sans boulet nommé PQ, il sera possible de poursuivre notre route, jusqu’au moment où le peuple du Québec contredira Godin et « choisira son avenir, sa vie et sa liberté ».