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Analyse des donateurs politiques selon le genre au Québec

Afin de rendre le financement politique le plus transparent possible, Élections Québec publie depuis 2000 les noms et prénoms des donateurs aux partis politiques. À partir de cette information trouvée sur leur site, j'ai créé un logiciel libre qui permet de déterminer le genre, femme ou homme, des prénoms des donateurs. Il est ainsi possible d'observer certains phénomènes concernant le genre des personnes effectuant des dons politiques au Québec. L'analyse des dons politiques selon le genre est, à ma connaissance, inédite au Québec.

Mes résultats montrent que la répartition des dons par genre varie selon le parti politique et évolue au fil des années. Plusieurs facteurs, variant selon le genre, peuvent influencer ces différences de proportion des donateurs femmes et hommes : revenus, génération, nombre, représentativité politique, etc. Toutefois, l'analyse présentée ici se veut purement descriptive, sans a priori sur les causes, qui pourront, elles, faire l'objet d'autres études.

1. Les femmes font moins de dons aux partis politiques et donnent en moyenne moins d'argent que les hommes

Graphique 1 : Proportion des dons effectués par des femmes, en nombre de dons et en montant d
Graphique 1 : Proportion des dons effectués par des femmes, en nombre de dons et en montant d'argent (2000-2018)

Sur le graphique de la proportion de dons effectués par des femmes au Québec depuis 2000, on constate que les femmes sont systématiquement moins nombreuses à faire des dons que les hommes. Cette différence était particulièrement marquée au début des années 2000, alors que les femmes représentaient moins de 25% de tous les donateurs.

De plus, on voit que le montant d'argent donné par les femmes est moindre que leur proportion ou, si on le formule autrement, les femmes donnent en moyenne moins que les hommes.

2. La progression du nombre de femmes effectuant un don est plus rapide que la progression du nombre de donateurs total

On voit sur le graphique 1 que la proportion de femmes parmi les donateurs augmente de manière presque continue depuis 2000, avec une augmentation rapide de 2011 à 2013. Que s'est-il passé durant cette période qui pourrait expliquer que le nombre de femmes effectuant des dons aux partis politiques a augmenté de dix points de pourcentage (de 28% à 38%) ?

Il s'agit peut-être d'un effet des réformes du financement effectuées par le PLQ, dans un premier temps (2010), et par le PQ dans un deuxième temps (2012). Le montant maximal du don annuel est passé de 3000$ à 1000$ en 2010, et à 100$ par année en 2012. Après ces réformes, le nombre de donateurs a doublé.

Graphique 2 : Variation du nombre de donateurs et du nombre de femmes (2000-2017)
Graphique 2 : Variation du nombre de donateurs et du nombre de femmes (2000-2017)

Le graphique 2 présente la variation annuelle du nombre de femmes ayant effectué un don et la variation du nombre total des donateurs. Chaque fois que la courbe bleue est au-dessus de la courbe fuchsia, la progression du nombre de femmes est plus rapide que la progression du nombre de donateurs total, et donc la proportion des femmes parmi les donateurs augmente. On remarque ainsi que lorsque le nombre de femmes augmente (points bleus au-dessus de zéro), la proportion des femmes augmente également (point fuchsia au-dessus de zéro).

C'est que si le nombre de femmes effectuant un don augmente, cette progression est plus forte que l'augmentation du nombre de donateurs au total.

3. Plus un parti politique est à gauche, plus la proportion des femmes donatrices est élevée

Graphique 3: Proportion de femmes donateurs au Québec, par parti politique (2000-2018)
Graphique 3: Proportion de femmes donateurs au Québec, par parti politique (2000-2018)

Si on regarde la proportion de femmes parmi les donateurs aux 4 principaux partis politiques (CAQ/ADQ, PLQ, PQ et QS), on constate qu'elles sont mieux représentées dans les partis les plus à gauche de l'échiquier politique.

Québec solidaire est à cet égard dans une ligue à part. Il est le seul parti politique avec plus de 500 donateurs par année dont la proportion de femmes est toujours supérieure à 40%. La proportion de donatrices est toujours plus élevée au PQ qu'au PLQ. La CAQ ferme la marche avec un peu plus de 30% de femmes dans ses donateurs.

Conclusion

L'analyse des dons selon le genre ajoute un aspect qui était jusqu'ici invisible dans les informations livrées par Élections Québec. J'en déduis que 1- les femmes font moins de dons aux partis politiques et donnent en moyenne moins d'argent que les hommes, 2- que la progression des donatrices est plus rapide que la progression du nombre de donateurs totaux, et que 3- plus un parti politique est à gauche, plus la proportion de femmes effectuant un don à ce parti est élevée.

Comme futurs axes de recherche, il serait intéressant d'étudier l'effet des réformes du financement sur la représentativité des donateurs, de vérifier si le profil des donateurs pour le genre correspond également à celui des votes.

On peut également se questionner à savoir si la sous-représentation des femmes dans les dons n'est pas une conséquence de la plus grande pauvreté des femmes par rapport aux hommes. Il y a sûrement un seuil de revenu en deçà duquel l'idée de faire un don n'est tout simplement pas admissible. Comme il y a plus d'hommes que de femmes au-dessus de ce seuil, ceux-ci seraient donc plus nombreux à faire des dons.

En conformité avec la méthode scientifique, je rends disponibles le code source, les données et les analyses, de même qu'une série de graphiques sur le site de dépôt Framagit, le tout sous une licence permettant le partage, l'étude, l'utilisation et la modification.

10 choses à savoir sur la constitution canadienne

Billet originalement publié sur le Huffington Post.

Voici ma contribution pour les 150 ans du Canada : 10 faits concernant la constitution canadienne qui m'ont marqué lors de mes lectures sur le Québec.

1. L'adoption de la constitution canadienne n'a jamais été soumise au peuple

Dans le système de Westminster, soit le système politique du Canada basé sur celui du Royaume-Uni, le peuple n'a qu'un seul pouvoir, celui d'élire les députés de la chambre basse (Parlement à Québec, Chambre des communes à Ottawa). Le peuple ne peut donc adopter une loi ou une constitution directement. C'est pour cette raison que la constitution canadienne a été adoptée par le Parlement de Londres avec l'assentiment du Sénat, de la Chambre des communes et des assemblées des provinces, à l'exception du Québec, et non par une consultation populaire.

Notons que dans ce système, les référendums n'ont qu'une valeur consultative et ne lient en rien le parlement des pays ou régions qui les tiennent. Cela vaut pour le référendum sur l'indépendance du Québec, celui de l'Écosse ou encore du Brexit. Légalement, ils n'ont aucune incidence.

2. Les compétences des provinces et du fédéral se complètent, elles ne se superposent pas

La compétence fédérale n'est pas supérieure à celle des provinces : elle comble tous les domaines qui ne sont pas de compétences provinciales, en plus de celles qui lui sont exclusivement réservées au fédéral dans la constitution.

3. La constitution canadienne est composée de quelques dizaines de textes, les plus importants étant la Loi constitutionnelle de 1867, le Statut de Westminster 1931 et la Loi constitutionnelle de 1982

Les deux textes de 1867 et 1982 font référence à plusieurs autres qui les ont précédés, ce qui leur donne ainsi une valeur constitutionnelle.

4. Les jugements de la Cour suprême concernant l'application de la constitution ont la même valeur légale que celle-ci ; ces jugements font donc partie à part entière de la constitution

La constitution canadienne ne répond pas à toutes les questions et elle est souvent matière à interprétation. Par exemple, elle ne mentionne ni n'encadre le rôle du premier ministre. C'est ainsi la Cour suprême qui, par son interprétation et ses jugements, indique quel sens donner à la constitution. La jurisprudence de la Cour suprême depuis 1867 sur les questions constitutionnelles peut donc être invoquée et elle a force de loi. Cependant, les jugements de la Cour suprême dans un même domaine peuvent évoluer au fil du temps.

5. En cas de concurrence entre deux lois valides, c'est celle du fédéral qui prime

Si deux lois s'appliquent, l'une fédérale et l'autre provinciale, de manière contradictoire, c'est la loi fédérale qui prévaut. Le gouvernement fédéral a ainsi tenté de libérer le domaine bancaire canadien de ses obligations en 2016 en légiférant sur la protection des clients bancaires. De cette manière, le fédéral aurait remplacé la loi sur la protection du consommateur du Québec par une version édulcorée, libérant les banques des obligations imposées par la législation québécoise et celles des autres provinces.

6. Si le fédéral juge qu'une compétence provinciale est d'intérêt national, il peut légiférer sur celle-ci

Alors que les ressources naturelles relèvent d'une compétence provinciale exclusive, la Commission canadienne de sûreté nucléaire délivre des permis pour l'exploitation d'uranium au Québec.

7. Le fédéral est responsable du territoire sur lequel il exerce sa juridiction : territoires indiens, cours d'eau navigable et terrains lui appartenant. Tout le reste du territoire appartient aux provinces.

Tout déversement de produit toxique, comme le pétrole, est ainsi de la responsabilité des provinces (coûts, mesures de nettoyage, gestion, etc.), sauf s'il survient en territoire fédéral (le fleuve Saint-Laurent, un territoire indien, un parc fédéral).

8. Le parlement fédéral peut modifier ses propres sphères de compétences au détriment des provinces, et ce, sans leur consentement, pour des travaux qu'il juge d'intérêt national ou qui concernent deux ou plusieurs provinces

Le parc des Champs-de-Bataille de Québec (Plaines d'Abraham) a été réclamé par le fédéral en 1908 sous prétexte qu'il était de l'intérêt général du Canada que ce terrain soit géré par le fédéral. C'est aujourd'hui un parc fédéral, c'est-à-dire une propriété administrée par le gouvernement du Canada.

9. Les pouvoirs qui ne sont pas énumérés dans ceux des provinces sont de compétence fédérale ; c'est ce qu'on appelle les pouvoirs résiduaires

Il y a deux manières de gérer ceux-ci dans une fédération : en les accordant au pouvoir central ou encore aux États fédérés. Le Canada, tout comme l'Inde et le Nigeria, accorde le pouvoir résiduaire à l'État central. Les États-Unis, la Suisse, l'Autriche et l'Australie sont des exemples de fédérations où le pouvoir résiduaire est accordé aux parties constituantes. La gestion de la fédération canadienne a donc pour effet de centraliser les pouvoirs vers le fédéral à mesure que s'ajoutent de nouvelles compétences.

10. Le fédéral a le droit de verser des sommes pour des fins qui ne relèvent pas de sa compétence (pouvoir de dépenser)

Si le fédéral ne peut légiférer dans un domaine de compétence provinciale, il a le droit de dépenser dans celui-ci. Comme cette question n'est pas prévue dans la constitution, c'est la Cour suprême qui a jugé que cela était possible. C'est par ce moyen que le gouvernement fédéral oriente le domaine de l'éducation au Québec, une compétence exclusive aux provinces, en donnant des bourses de recherches ou encore en finançant la construction de pavillons d'université.

11 (bonus). Les lois provinciales s'appliquent aux domaines d'exclusivité fédérale, tant que celles-ci n'empêchent pas la mission première de la compétence fédérale

La loi sur la protection du consommateur (LPC), une loi québécoise, s'applique aux banques canadiennes, un domaine de compétence fédérale. En effet, cette loi n'empêche pas les banques de faire du commerce au Québec, elle est donc compatible avec la loi fédérale. Grâce à la LPC, les banques ne peuvent pas changer les clauses d'un contrat avec un client ou une cliente québécoise sans leur consentement, ce qui serait possible dans un contexte purement canadien.

La Révolution tranquille voudrait se réveiller

Billet originalement publié sur le Huffington Post.

Cet article a originalement été écrit et publié en catalan par le député indépendantiste catalan Ferran Civit sur le site web VilaWeb. Ferran était de passage au Québec dans le cadre de la première mondiale du documentaire Le peuple interdit. Traduction de Marc Pomerleau.

«Le Québec se trouve dans une situation semblable à celle du Pays basque, où le mirage de l'entente économique donne l'impression que l'unique aspiration politique est celle de gouverner une agence administrative.»

C'est au Festival du nouveau cinéma de Montréal qu'a eu lieu la première mondiale du documentaire Le peuple interdit, réalisé par le cinéaste québécois Alexandre Chartrand, qui traite d'un peuple à qui on interdit de faire un référendum, le peuple catalan. Tout le gratin de l'indépendantisme québécois était présent: tant les représentants des principaux partis politiques souverainistes (Parti québécois, Québec solidaire et Option nationale) que des Organisations unies pour l'indépendance (OUI Québec). La communauté catalane, en pleine expansion, était également de la partie: on pouvait y croiser des membres du Cercle culturel catalan du Québec, du chapitre québécois de l'Assemblée nationale catalane (ANC Québec) et des Castellers de Montréal, ces constructeurs de tours humaines à la catalane. L'enthousiasme était palpable à la fin de la projection: applaudissements et ovation de plusieurs minutes pour le documentariste.

Mais cet enthousiasme était-il partagé de part et d'autre? Le spectateur catalan a-t-il vu le film comme le spectateur québécois? Non. Le Catalan l'a regardé avec nostalgie, soit celle du pays, soit celle des mobilisations, et avec l'envie de rentrer dans ce pays pratiquement converti en République catalane. Le spectateur québécois, lui, est resté bouche bée après avoir appris que les Catalans ne peuvent pas voter sur l'avenir de leur pays et avoir constaté l'ampleur des mobilisations faites en Catalogne et ce, même si le documentaire ne présente que la gigantesque V de 2014 et la Via Lliure [Voie libre] de 2015.

Les conversations qui ont eu lieu après le visionnement du documentaire et surtout celles tenues au cours de la semaine ont fait ressortir que le mouvement québécois est pris dans un enlisement stratégique. Après les pas de géant réalisés à l'époque des référendums de 1980 et 1995, le Québec recommence à se mobiliser pour l'indépendance, à débattre et à élaborer des scénarios.

Malgré la loi qui 101 qui garantit la prédominance du français au Québec et l'acceptation de la plurinationalité sur le territoire canadien - ce que beaucoup aimeraient voir au sein de l'État espagnol -, le Québec aimerait se réveiller face au mirage du fédéralisme canadien. Il se trouve dans une situation semblable à celle du Pays basque, où le mirage de l'entente économique donne l'impression que l'unique aspiration politique est celle de gouverner une agence administrative. Toutefois, avec un peu de recul, il semble que la Catalogne n'aurait pas tant progressé vers l'indépendance si elle avait obtenu le niveau de respect auquel ont droit les Québécois et les ressources propres dont jouissent les Basques. L'indépendantisme serait-il si fort si la langue catalane était considérée égale à l'espagnol par l'administration centrale, si la Catalogne n'était pas fiscalement spoliée et si l'État espagnol investissait dans les infrastructures catalanes? Il semble que les fédéralistes canadiens ont compris cet aspect, du moins en partie. En Espagne, comme le fédéralisme est inexistant, personne ne l'a compris.

La sensation de confort rend amorphe quand il est question de changement. Mais la volonté y est. Les débats au sein du Parti québécois n'ont pas cessés avec l'élection récente de Jean-François Lisée comme chef. On parle de comment et quand faire un troisième référendum, mais on ne voit pas arriver les conditions gagnantes pour mettre le processus en marche. Sans consensus tant à l'interne qu'à l'externe, l'unique option semble être sur le long terme. Pour cette raison, il y a quelques années est né un parti plus indépendantiste et plus à gauche, Option nationale, dont le chef est Sol Zanetti et qui pour le moment ne compte aucun député.

On retrouve également Québec solidaire, encore plus à gauche, mais davantage timide sur la question de l'indépendance. En vertu du système en vigueur, ce parti a obtenu trois sièges à l'Assemblée nationale (oui oui, nationale!) du Québec. Il est parfois question de créer une coalition plus progressiste et indépendantiste qui allierait ces deux formations politiques minoritaires.

Pour ce qui est de la société civile, un ensemble d'organisations indépendantistes se regroupe au sein de Oui Québec. Ce regroupement ressemble davantage à la Plateforme pour le droit de décider (PDD) qu'à l'Assemblée nationale catalane (ANC), mais avec l'option indépendantiste en plus. Même si les conditions gagnantes ne sont pas réunies, les organisations québécoises sont conscientes qu'elles doivent travailler de concert avec les partis politiques afin de préparer le terrain.

Bien qu'en surface les eaux semblent stagnantes, des gens veulent que les choses commencent à bouger. Des personnalités de la société civile de divers horizons (écologie, politique, mouvements étudiants, féminisme, culture, etc.) croient qu'il est nécessaire de parler du Québec de l'avenir en énonçant le célèbre « Faut qu'on se parle ». Pour l'heure, des séances n'ont eu lieu qu'à Québec et Montréal, mais l'objectif est de se mobiliser sur l'ensemble du territoire. L'idée est d'enclencher un mouvement national du bas vers le haut à l'aide des nouvelles technologies dont l'objectif est la mise en œuvre d'un processus émancipateur et politiquement renouvelé.

Il semble parfois que la Révolution tranquille voudrait se réveiller, comme dans le cas des grandes mobilisations étudiantes d'il y a quelques années. Et peut-être le verrons-nous dans la foulée du projet de construction d'un oléoduc qui traverse le Québec. Lorsque d'autres régions canadiennes ont refusé le passage du pétrole des sables bitumineux de l'Alberta par le Pacifique, le gouvernement fédéral a décidé de passer par l'est. Environ 90 % de la partie à construire traverse le Québec, principalement la région où il y a la plus importante concentration démographique, c'est-à-dire la vallée du Saint-Laurent. L'oléoduc a été vu comme une atteinte à la souveraineté du Québec et comme un attentat contre l'environnement. Qui sait, l'opposition qui en découle pourrait faire passer le débat d'une transition énergétique à une transition nationale vers l'indépendance, le tout dépendant de l'attitude du gouvernement québécois et de celle du gouvernement fédéral.

Le bouillonnement reprend au Québec, mais on ne sait pas encore s'il se poursuivra et où il mènera. La Catalogne, quant à elle, est en pleine ébullition et c'est ce qu'Alexandre Chartrand a filmé en 2014 et 2015. Et si les Catalans veulent savoir comment ils sont perçus depuis le Québec, ils ont pu se rendre en salle et voir Le peuple interdit à Barcelone le 24 novembre et à Perpignan le 26 novembre. Pour revenir sur ce qui a été accompli, il n'y a rien de mieux que l'œil averti d'un étranger qui nous offre son miroir. Merci, Alex!

Léo Major honoré à Montréal?

Billet originalement publié sur le Huffington Post.

À l'occasion des 70 ans de la libération de la ville néerlandaise de Zwolle par le Québécois Léo Major, la ville de Montréal doit saisir cette occasion afin d'entamer la procédure pour nommer une rue en son honneur.

Rue Léo Major

Le 14 avril 2015, la ville de Zwolle au Pays-Bas soulignera les 70 ans de sa libération de l'occupation nazie. C'est un soldat québécois qui, à lui seul, a chassé les nazis de Zwolle pendant la nuit du 13 au 14 avril 1945. Léo Major a, pour cet exploit inégalé dans l'histoire militaire moderne, reçu la médaille de conduite distinguée, seconde plus haute distinction du Commonwealth.

Comme chaque année, des fleurs seront déposées au pied du mémorial de guerre de Zwolle, érigé en mémoire de tous ceux tombés pour la libération de cette ville en 1945. L'Unifolié sera hissé pour commémorer les libérateurs, en particulier le « premier libérateur canadien Léo Major ».

En 2008, lors du décès de Léo Major, les Pays-Bas ont mis le drapeau de leur pays en berne. Au Québec, au même moment, le Journal de Montréal était le seul journal francophone à mentionner son départ en publiant un simple entrefilet. Aujourd'hui encore, l'exploit de Léo Major reste inconnu des Québécois.

Le programme scolaire au Québec couvre les deux Guerres mondiales en soulignant essentiellement la conscription imposée aux Québécois, ignorant les faits d'armes de nos soldats ayant combattu outre-mer. Il est temps que nous nous appropriions notre passé militaire, notamment en reconnaissant nos héros de guerre comme Léo Major.

Une ville des Pays-Bas commémore annuellement l'acte de bravoure d'un de nos compatriotes alors que rien n'existe dans la ville où il a grandi pour souligner ses exploits. En juin 2014, le Comité de toponymie de Montréal a ajouté le nom de Léo Major dans la banque prévisionnelle de toponymie. Montréal a ainsi toute la latitude pour suivre l'exemple de la « Leo Majorlaan » de Zwolle. Alors, à quand la rue Léo Major?

Rue Léo Major à Zwolle

Un vaccin pour la maladie de Lyme?

Pays touchés par la maladie de Lyme
Pays touchés par la maladie de Lyme.

Dans son bulletin de nouvelles du 14 août 2014 à 7h du matin, Radio-Canada annonce que « l'absence d'un vaccin contre la maladie de Lyme sème l'inquiétude », comme si, d'une part, cette maladie était une nouveauté sur la planète et, d'autre part, qu'il suffisait d'un peu d'effort pour trouver un vaccin.

La maladie de Lyme affecte 65 pays à travers le monde et est une préoccupation dans plusieurs pays d'Europe depuis de nombreuses années. En Belgique, lors des sorties en camps scouts, les enfants sont inspectés tous les soirs pour identifier la présence de tiques, et cela depuis plus de 10 ans. Aux É.-U., elle est la 7e maladie la plus déclarée au pays, et elle a touché plus de 3 millions de personnes depuis 1970. Tous ces pays sont déjà préoccupés par la maladie de Lyme et doivent sûrement se pencher sur la question du vaccin depuis des décennies.

D'autre part, avec 114 cas déclarés au Québec en 2013, il faudrait qu'un vaccin ait un taux d'innocuité inférieur à 0,04% pour ne pas que le nombre de personnes touchées par des effets secondaires dépasse les gens protégés (j'ai estimé à 3 millions la population vivant au sud du St-Laurent et pouvant être affectée au cours des prochaines années).

Bref, bien que la maladie de Lyme soit une préoccupation importante, et sans diminuer l'impact majeur dans la qualité de vie de ceux qui en sont atteints, cette préoccupation est surtout celle des autres pays, et ce n'est pas parce que le Québec est touché que, tout à coup, l'absence d'un vaccin est inquiétant, et encore moins à porter de main.

Soyons humbles et prenons conscience que cette maladie affecte surtout les autres pays et que cette rumeur de vaccin sert surtout à nous assurer que les autorités prennent les choses en main, et ne recele dans les faits aucune information nouvelle.

Observations d'un (nouveau) cycliste montréalais

Billet originalement publié sur le Huffington Post.

Depuis la fin avril, j'utilise le vélo comme moyen de transport pour me rendre au travail. De Villeray au centre-ville de Montréal, le parcours me prend trente minutes, tant à l'aller qu'au retour. C'est une première, car auparavant, la distance entre mon lieu de travail et ma résidence était trop grande pour ce moyen de transport.

Moi qui n'étais qu'un cycliste de fin de semaine, j'ai rapidement constaté que ce n'était pas la même chose d'aller à l'épicerie un samedi après-midi que de se rendre au centre-ville à l'heure de pointe.

La principale différence, c'est le respect de la signalisation.

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Pour les courts trajets hors période de pointe, le respect de la signalisation routière (arrêts, feu rouge) m'était optionnel et n'entraînait que rarement des problèmes. Or, le nombre de cyclistes sur la route du travail est si important qu'un certain ordre est nécessaire, notamment celui imposé par la signalisation. Les cyclistes sont donc nombreux à s'y conformer, même si cela ne les empêche pas de faire n'importe quoi à certains endroits précis.


Troisième différence, ce sont toutes les situations routières auxquelles je n'ai jamais été confronté auparavant et pour lesquelles je ne sais pas quelle conduite adopter. Exemple de questions auxquelles j'ai dû trouver une réponse:

  • Une brigadière fait traverser les gamins à une intersection, ai-je le droit de passer? Non.
  • Un autobus scolaire s'arrête et fait débarquer des gamins, puis-je continuer? Oui
  • Puis-je circuler dans la voie réservée aux taxis et aux autobus ? Non, mais il y a actuellement un projet pilote qui le permet sur la rue Viau.
  • Puis-je vraiment circuler sur les trottoirs? Non, sauf à quelques endroits à Montréal.
  • Puis-je passer à la lumière rouge si la traverse pour piéton est permise? Non.

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Étant cycliste du dimanche, j'ignorais ces règles et à voir le nombre de cyclistes qui les bafouent, par ignorance ou sciemment, je suis loin d'être le seul.

Ces observations, ajoutées aux nombres d'accidents impliquant des cyclistes à Montréal, me laissent croire que la game a changé sur les routes de Montréal: les usagers doivent changer leur conduite pour mieux partager la route.

Il y a bien sûr les cyclistes qui, comme je l'ai décrit, doivent apprendre à réagir aux nouvelles situations. Le code de la sécurité routière devra également être mis à jour pour tenir compte de la nouvelle popularité et les cyclistes devront surtout apprendre à le respecter. Il serait bien qu'une éthique entre cyclistes voit le jour, ne serait-ce que pour souligner les comportements délinquants. Un commentaire d'un cycliste est toujours mieux reçu que celui d'un automobiliste.

Les automobilistes et camionneurs devront accepter que la route serve au transport des biens et des personnes, et non pas à un type de véhicule en particulier. Le vélo a sa pleine et entière place, au même titre que les automobiles et camions. Et finalement, les piétons ont aussi leur bout de chemin à faire, ce sont les usagers les plus délinquants, traversant la rue n'importe où, à tout moment, et négligeant de prendre en compte les vélos.

Il est essentiel de mettre les moyens en place pour faciliter la transition vers un meilleur partage de la route. L'augmentation de la popularité du vélo fait partie d'un développement urbain durable, c'est la voie à suivre.

L'environnement: un enjeu indépendantiste (bis)

Billet originalement publié sur le Huffington Post.

À la suite de la publication de mon texte sur l'environnement et l'indépendance, un ami et collègue m'a fait parvenir des objections à mon analyse. Comme les arguments qu'il avance reviennent souvent dans les discours portant sur l'indépendance du Québec, je publie ici mes réponses dans l'espoir qu'elles puissent servir ou en inspirer d'autres.

1. Un Québec indépendant ne changerait pas la situation mondiale désastreuse de l'environnement. Le Québec comme exemple? Je n'admets pas cet argument. Il y a de nombreux pays qui sont des exemples environnementaux et le reste du monde s'en moque.

Il est certain que le poids du Québec pays, dans les relations internationales ne serait pas celui des États-Unis, nous devons demeurer humbles concernant l'influence que nous aurions sur la scène internationale. Cela dit, elle ne serait pas nulle.

Il faut se mettre dans le contexte de la création d'un pays du Québec, émergeant d'un pays du G8, et qui aurait alors l'attention mondiale dirigée sur lui. Il serait alors possible d'avoir une certaine influence, notamment en environnement. Ce serait également vrai par la suite, puisque le Québec aurait un siège dans les instances internationales, ce qui n'est pas le cas à l'heure actuelle.

Pour se convaincre de notre potentiel, pensons aux pays scandinaves dont on parle sans cesse lorsque vient le temps de comparer les indices de développement. Ces pays ne sont pas si importants, économiquement ou militairement, sur le plan mondial, pourtant ils sont très souvent pris comme modèles. Encore cette semaine dans le journal, on se demandait si Philippe Couillard allait s'inspirer «de l'Alberta et du Dakota du Nord ou de la Suède et du Danemark».

Le Québec pays peut avoir une influence comparable à la Norvège ou à la Suède, ce n'est pas une proposition extravagante.

2. Un Québec indépendant, dirigé par un gouvernement d'Option nationale s'opposerait sans doute au pipeline, mais qu'en serait-il d'un gouvernement libéral dans un Québec indépendant? Ou d'un autre gouvernement moins sensible à l'environnement? Ces partis existeront toujours après une éventuelle accession à l'indépendance. Et ils obtiendront probablement le pouvoir. Supposons que le Québec était indépendant le mois dernier. Le PQ aurait quand même été en faveur de l'inversion du pipeline…

Tout à fait d'accord.
Il est d'ailleurs important de souligner ce fait : le Québec pays est le début des revendications, non pas la fin. À ce moment, le Québec aura accès à tous les leviers pour décider de son avenir, ce sont là des questions de pays que nous aurons à nous poser.

J'ajouterais aussi qu'il ne faut pas mettre de conditions à l'indépendance : la liberté est une valeur en soi. Elle n'a pas à s'accorder aux autres valeurs des libérateurs (partis politiques, institutions, dirigeant[es], etc.). Le Québec sera un État démocratique dans lequel tous les partis politiques, toutes les voies politiques démocratiques, pourront s'exprimer et ce sera au peuple en fin de compte à faire son choix, pas aux fondateurs du pays.

Je dis d'ailleurs dans l'article que :
« Cela ne veut pas dire que le Québec pays serait nécessairement un exemple, le mouvement indépendantiste a aussi ses dinosaures, mais il aura au moins la chance de faire les choses différemment. »

3. Le Québec, quittant la fédération canadienne, aura sans doute comme principal effet de faire accélérer le développement des sables bitumineux (et non pas le contraire). Exemple : Les grands partis fédéraux du Canada n'auront plus à jongler avec le dilemme de faire plaisir aux environnementalistes de l'est du Canada. Le PLC est dans ce dilemme, il veut faire plaisir à deux bases électorales différentes. Sans le Québec, les intérêts de l'Ouest gagneront facilement dans un Canada amputé du Québec.

Le Canada a déjà la politique étrangère d'un pétro-État. La présence du Québec ne change présentement rien à cet état de fait.

Est-ce qu'un futur gouvernement, élu avec l'aide des Québécois, pourrait changer cela? Peut-être, mais il reste à prouver d'une part que cela peut se faire, et d'autre part ce gouvernement serait lui aussi temporaire, un changement pouvant toujours survenir par la suite sans l'apport du Québec (les conservateurs seront encore là).

Quelle différence entre le Canada et le Québec alors, puisqu'un parti politique pourra toujours prendre des décisions négligeant l'environnement ou un autre sujet critique? Ou comme je l'ai souvent entendu : « À quoi sert-il d'être indépendant si c'est pour être un mini-Canada »?

La différence, c'est que ce sera aux Québécois de faire des choix pour les Québécois. En ce moment, plusieurs décisions sur notre territoire nous sont imposées par un gouvernement qui est élu en majorité par un peuple qui n'est pas le nôtre.

Les décisions du Canada sont prises en majorité par un autre peuple qui a des valeurs et des intérêts qui divergent des nôtres - sans vouloir qualifier ce peuple de meilleur ou de pire - et ce pouvoir s'accentuera dans l'avenir, en raison du déclin démographique du Québec par rapport aux autres provinces. Assumer et faire des choix qui concernent notre territoire, tant pour les humains que pour l'environnement, sont des raisons suffisantes pour faire du Québec un pays.

Les indépendantistes écossais ont une approche particulièrement intéressante concernant les partis politiques et l'indépendance. Leur Guide pour l'indépendance de l'Écosse présente «Les avantages de l'indépendance de l'Écosse - peu importe le parti au pouvoir» (p. xiv). Dans l'introduction, il est expliqué qu'en cas de création du pays, «le futur de l'Écosse sera dans les mains des Écossais», et qu'à l'inverse, les «décisions concernant l'Écosse resteront dans les mains des autres» (p. i). En remplaçant le mot «Écosse» par «Québec», nous avons là un excellent préambule pour un document semblable pour l'indépendance du Québec. La liberté des peuples reposant en effet sur des principes universels.

L'environnement: un enjeu indépendantiste

Billet originalement publié sur le Huffington Post.

En lisant les résumés du dernier rapport du GIEC cette semaine, il m'est venu un certain découragement. Ce que le rapport dit, en gros, c'est qu'au cours des dernières décennies, beaucoup de discussions ont eu lieu sur la scène internationale, mais aucune mesure réellement concrète n'a été mise en place pour lutter contre le réchauffement climatique. Si rien n'est fait, il y aura des famines, des réfugiés climatiques et des morts par millions dans les prochaines années.

Étant porte-parole d'Option nationale pour l'environnement lors de la dernière campagne électorale au Québec, il m'est apparu essentiel d'expliquer, sur les trop rares tribunes qui m'ont été offertes, les problèmes que causera le réchauffement climatique. Il m'est également apparu fondamental de faire comprendre que pour jouer son rôle dans cette lutte, le Québec devait refuser toute politique favorisant l'exploitation du pétrole de schiste ou des sables bitumineux, incluant l'exploitation d'Anticosti et les pipelines d'Enbridge et de Trans-Canada, puisque cette exploitation émet de 25 % à 75 % plus de CO2 que le pétrole conventionnel. Enfin, j'ai expliqué qu'aucune loi votée par les hommes ne peut avoir préséance sur une loi de la physique et que de ne pas faire de l'environnement une priorité revient à prétendre que la gravité n'existe pas. Que pour négocier, le peuple québécois serait mieux représenté sur la scène internationale s'il avait, devant lui, un petit carton avec le mot «Québec», plutôt que celui du «Canada».

Le Canada est en effet parmi les pires États au monde en ce qui a trait à la lutte contre le réchauffement climatique : il a renié sa signature du protocole de Kyoto, a revu à la baisse ses objectifs de réductions d'émissions de CO2 à deux reprises et n'a pris aucune mesure concrète pour les atteindre. C'est donc sans surprise qu'il ne les atteindra pas.

Cela ne veut pas dire que le Québec pays serait nécessairement un exemple, le mouvement indépendantiste a aussi ses dinosaures, mais il aura au moins la chance de faire les choses différemment.

Le Canada ayant 30 % de son PIB issu du pétrole albertain, il protège l'exploitation du pétrole sur la scène internationale. Le Québec a la chance de ne pas avoir une économie basée sur ses ressources en hydrocarbures. Cela lui permettra de faire des choix différents de ceux du Canada et de prendre des mesures réelles afin de lutter contre le réchauffement climatique.

Malheureusement, lors de la dernière élection, les principaux partis politiques ont mis ce débat de côté. Ils ont préféré suivre les conseils de leurs analystes politiques, brandissant la peur comme élément de rassemblement des Québécois : la peur des turbans, la peur des référendums, la peur de la dette.

Les résultats de cette élection ont donné lieu à un foisonnement d'analyses, mais peu importe l'opinion, ils constituent un électrochoc pour une grande partie de l'électorat, surtout celle qui prenait pour acquis la progression historique de l'émancipation du peuple québécois. Il est souhaitable que ce séisme donne lieu à un réalignement des forces politiques du Québec d'ici les élections de 2018 et que l'environnement ait sa juste part au sein de cette renaissance.

Et c'est pour lutter contre le découragement, cet abandon consumériste, que nous devons militer, entre autres, pour un engagement plus concret et réaliste des partis politiques envers l'environnement.

Le mouvement indépendantiste doit s'approprier cet enjeu incontournable, mais il ne doit pas le faire à des fins électoralistes. Il doit se l'approprier afin de démontrer au peuple québécois que la création d'un État lui permettra non seulement de contrôler sa destinée culturelle et économique, mais aussi environnementale. L'environnement est l'ensemble des éléments naturels et culturels qui entourent un être vivant. Il est donc intimement lié à notre émancipation.

En attendant le Messie

Billet originalement publié sur le Huffington Post.

On me dit souvent, lorsque je discute indépendance avec des amis, que les problèmes du Québec se régleront avec l'arrivée d'un chef charismatique - René Lévesque est toujours donné en exemple - qui par sa simple parole unira les Québécois et les amènera au pays rêvé. Or, la théorie du Messie politique est erronée, ce sont les événements de l'histoire qui créent les chefs et non l'inverse.

Il est important, dans un premier temps, de remettre en contexte l'oeuvre politique de René Lévesque. Il est sans l'ombre d'un doute un grand homme politique québécois, mais il est faux de penser qu'il n'a eu qu'à se présenter et que les Québécois le suivaient dans tout ce qu'il proposait. Il a été actif en politique pendant 27 ans et a eu des succès extraordinaires comme la nationalisation de l'électricité et l'élection du Parti québécois en 1976. Mais il faut également souligner qu'il a connu des échecs, que ce soit lors des élections de 1970 ou encore le référendum de 1980. De plus, la population québécoise n'a pas toujours été derrière lui, bien au contraire. En janvier 1983, par exemple, quelque 30 000 syndiqués défilent devant l'Assemblée nationale et brûlaient des mannequins à son effigie. Il démissionnera en 1985, poussé à la porte par plusieurs membres de son caucus.

Le temps qui passe gomme les difficultés du parcours de René Lévesque de notre mémoire collective, ne laissant que les grands moments. Si bien que 25 ans après sa mort, il nous reste l'impression qu'il n'avait qu'à parler pour que le peuple emboîte le pas dans son projet politique. Or, cela n'a jamais été le cas, il a travaillé sans relâche, a connu des moments extrêmement difficiles et il est apparu dans un contexte où la société avait soif de changement et avait la démographie, grâce à l'arrivée de la génération des baby-boomers, pour appuyer ces changements.

Ce sont les événements qui révèlent les chefs. Ceux qui feront du Québec un pays sont autour de vous, ils travaillent chaque jour d'arrache-pied pour lui donner son indépendance. Ce n'est pas un seul homme ou une seule femme qui, par sa seule parole, fera la différence. Lorsque le peuple se mettra en marche, animé de la volonté de changer le parcours politique monotone du Québec, les nouveaux chefs émergeront et mèneront la population. N'attendons pas le moment où la personne opportune, c'est à nous tous de libérer le Québec, maintenant.

Les erreurs de La Presse et du Journal de Montréal

Au cours du printemps 2012, La Presse et le Journal de Montréal ont chacun commis une bourde monumentale pouvant être associée à de la propagande, se discréditant aux yeux de la population supportant les étudiants dans leur lutte.

L'erreur du Journal de Montréal

Le premier à avoir commis une faute est le Journal de Montréal. Au lendemain de la manifestation monstre du 22 avril, probablement plus de 200 000 manifestants, le Journal n’en parlait pas en une.

Une du Journal de Montréal le 23 avril 2012

Il faut dire qu’ils s’étaient déjà pratiqués avec la manifestation du 22 mars, entre 100 000 et 200 000 manifestants, où ils avaient réussi à titrer que le mouvement perdait des appuis avec en arrière-plan une photo de la foule.

Une du Journal de Montréal le 23 mars 2012

Quelques jours plus tard, au lendemain du congrès du PLQ à Victoriaville, une photo de mauvaise qualité apparaît à la une du Journal. Aussitôt, une rumeur de traitement Photoshop, par laquelle le Journal aurait ajouté une brique dans les mains de l'émeutier, se répand sur les réseaux sociaux. Rumeur démentie le lendemain.

Une du Journal de Montréal le 5 mai 2012

L'erreur du La Presse

La faute de La Presse est d’avoir fait sa une avec les résultats d’un sondage indiquant que les Québécois appuyaient massivement la loi 78, loi spéciale jugée par plusieurs comme violant à la fois la charte québécoise et la charte canadienne des droits. Or, ce sondage a une méthodologie des plus douteuses.

Cela a soulevé l’ire sur la Toile. On ne badine pas avec les libertés civiles. Christian Bégin a signé un texte, assez représentatif de la colère ambiante, appelant une campagne de désabonnements de La Presse. Celle-ci a été diffusée et appuyée sur les réseaux sociaux.

Le lendemain de cette erreur, La Presse a fait une autre bévue, pouvant confirmer la mauvaise foi qui aurait causée la première. Lors de la 26e nuit de manifestation à Montréal, la journaliste de La Presse Gabrielle Duchaine a été arrêtée et un de ses gazouillis a alors été repris sur Twitter : « Toujours avec @fatrudel du JdeM en état d'arrestation. Le policier m'a dit se "calisser" du fait que je suis journaliste #manifencours #ggi » . Le lendemain, une partie de ce texte apparaît sur l’article en ligne de la journaliste, pour être ensuite retirée sans explication.

Cette modification a probablement été faite pour des raisons éditoriales, le style du commentaire jurant sensiblement avec le niveau de texte que l’on retrouve habituellement dans La Presse. Mais encore une fois, il n’en fallait pas plus pour que la rumeur de censure à des fins de propagande se répande dans les réseaux sociaux.

Pour chacun de ses deux journaux, la première erreur a créé un contexte favorable à la propagation d’une rumeur par la suite. Une lecture possible de cette propagation est de confirmer le manque de crédibilité des réseaux sociaux. Il faut plutôt y voir une mesure de la méfiance qui s’est installée chez ceux qui prennent leurs informations sur ceux-ci: ils croient que ces journaux manipulent leur information pour soutenir le gouvernement et n'hésitent pas à faire circuler des nouvelles confirmant cette opinion.

Malheureusement, ces grands médias s'adonnent peu à l’autocritique. Lorsque des journalistes se font molester par les manifestants, cela est déplorée, avec raison, par beaucoup d’entre eux. Cependant, il serait bien qu’ils poussent la réflexion jusqu’à se demander comment les manifestants ont pu en arriver là.

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